Prison ferme pour insulte à Taubira : le FN dénonce un « guet-apens judiciaire » (Le Monde, 16 juillet 2014)

« La sanction est lourde, et le tribunal est allé au-delà des réquisitions du parquet. La condamnation à neuf mois de prison ferme d’une ex-candidate frontiste, qui avait comparé Christiane Taubira à une guenon, n’a pas manqué de faire réagir les responsables du Front national.

L’intéressée elle-même a annoncé, mercredi 16 juillet, son intention de faire appel de sa condamnation :

« C’est totalement disproportionné, j’ai été très choquée d’apprendre ce jugement. Les criminels sont condamnés et ont un bracelet et moi on me donne de la prison ferme »

« CHAUSSE TRAPPE »

Dans un communiqué où elle annonce elle aussi son intention de faire appel, la direction du FN a dénoncé un « guet-apens judiciaire » et déplore les conditions duprocès :

« Clairement, au tribunal de Cayenne, les règles ne sont pas appliquées, il faut dénoncer avec vigueur ces violations incroyables de notre état de droit. »

Le parti qualifie le procès de « chausse trappe » au motif qu’il « n’est pas parvenu à trouver à Cayenne un avocat susceptible de défendre » l’ancienne candidate frontiste.

Dans ce texte, le FN met également en cause le juge Stéphane Rémy, président du tribunal correctionnel. Le mouvement de Marine Le Pen explique en effet qu’il appartient au Syndicat de la magistrature, régulièrement dénoncé par les partis de droite à cause de l’affaire du « mur des cons ». Le FN demande que ce juge soit récusé.

LES FRONTISTES APPORTENT LEUR SOUTIEN

Si Mme Le Pen n’a pas encore réagi personnellement à la condamnation, de nombreuses personnalités d’extrême droite se sont relayées pour dénoncer ce jugement.

Anne-Sophie Leclère, ex-tête de liste FN aux municipales dans les Ardennes, a été condamnée mardi par le tribunal de grande instance de Cayenne à neuf mois de prison ferme et 5 ans d’inéligibilité pour avoir comparé la Garde des Sceaux Christiane Taubira à un singe.

Le numéro deux du Front, Florian Philippot, évoque lui une condamnation« disproportionnée » :

Sur BFMTV, il a ainsi dénoncé un « jugement politique ». Pour étayer son propos, l’eurodéputé a repris l’argumentaire posté sur Twitter la veille par Fabrice Robert, le président du Bloc identitaire – mouvement d’extrême droite proche du FN – qui compare la condamnation de Mme Leclère à d’autres peines prononcées pour des délits différents :

M. LE FOLL ÉVOQUE UN « ACTE DE RACISME »

De l’autre côté de l’échiquier politique, Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement, a déclaré mercredi sur France 2 ne pas émettre de « jugement sur le jugement » :

« Je ne porte pas de jugement sur le jugement, je condamne ce qui est un acte de racisme. »

Invitée de la matinale de France Info, la sénatrice Europe Ecologie-Les Verts du Val-de-Marne Esther Benbassa a salué cette condamnation : « C’était nécessaire. Je vois combien de tweets racistes on reçoit. Il faut que parfois ça serve d’exemple. » L’universitaire s’est tout de même interrogée sur la lourdeur de la peine infligée à Mme Leclère.

Une certaine réserve que ne partagent pas les associations antiracistes, qui se félicitent d’« un fait rare voire inédit ». « Les juges ont voulu envoyer un message, un coup de semonce », a plaidé sur RTL Alain Jakubowicz, le président de la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme)qui juge la sanction non disproportionnée. « Ce qui est scandaleux, c’est l’habitude qu’ont prise un certain nombre de juridictions de prononcer des décisions de justice qui ne sont pas à la hauteur du trouble à l’ordre social », avant d’évoquer à titre d’exemple Dieudonné, qui porte les amendes à répétition infligées par la justice « comme une décoration ».

Anne-Sophie Leclère, ex-tête de liste FN aux municipales à Rethel, dans les Ardennes, a été condamnée mardi par le tribunal de grande instance de Cayenne à neuf mois de prison ferme et cinq ans d’inéligibilité, assortie d’une amende de 50 000 euros. Le TGI de Cayenne a par ailleurs condamné le Front national à 30 000 euros d’amende.

Une décision dont s’est réjoui SOS-Racisme :

« Ce parti, dont la matrice est la haine de l’autre, doit cesser de faire mine de découvrir le profil raciste et antisémite de ses candidats uniquement lorsqu’une polémique publique commence à poindre. »

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