Vu du Sénat #66: Après la Suède, pour une reconnaissance française de l’État de Palestine (Le Huffington Post, 3 novembre 2014)

L’opération « Bordure protectrice » conduite par l’armée israélienne dans la bande de Gaza, en juillet et août 2014, en guise de riposte au meurtre de trois adolescents israéliens et à l’envoi répété de missiles par le Hamas en direction des villes du Sud d’Israël, a causé, du côté palestinien, la mort de 2 100 Gazaouis, pour l’essentiel des civils, et 11 000 blessés. Il est urgent d’agir pour que cessent les souffrances, les destructions et le sang versé.

Cette nouvelle explosion de violence a démontré une fois de plus, s’il en était besoin, l’urgence d’un plan de paix, et le devoir, pour les puissances européennes et américaine, d’inciter les deux parties, avec toute la détermination requise, à s’engager concrètement sur la voie d’un tel plan, et ce d’autant plus que la situation au Moyen-Orient se détériore gravement de jour en jour sur nombre de fronts. Sans oublier l’embrasement de ces derniers jours, à Jérusalem-Est, qui, s’il n’est pas maîtrisé, peut marquer le départ d’une troisième Intifada.

Un environnement international plus favorable

À ce jour, cent trente-quatre pays ont franchi le pas de la reconnaissance de la Palestine, dont les anciens membres du pacte de Varsovie, dans les années 1980. Les pays fondateurs de l’Union européenne, eux, résistent encore. Plusieurs signes attestent cependant d’un changement progressif d’attitude. Le 13 octobre, la Chambre des Communes britannique a voté une motion non contraignante engageant le gouvernement anglais à « reconnaître l’État de Palestine à côté de l’État d’Israël ». Et le 30 octobre, le gouvernement suédois a reconnu officiellement l’Etat palestinien, devenant ainsi le premier pays de l’UE à le faire.

Le 12 octobre 2014, à la Conférence du Caire pour la Palestine et la reconstruction de Gaza, Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, déclarait quant à lui : « L’objectif est clair : un État de Palestine indépendant, démocratique, contigu et souverain, vivant dans la paix et la sécurité aux côtés d’Israël, sur la base des lignes de 1967, avec Jérusalem comme capitale des deux États. Cette solution des deux États est menacée sur le terrain notamment par la colonisation. Face à ce danger, il nous faudra bien reconnaître l’État palestinien. »

Dans les prochaines semaines, une résolution proposée par Mahmoud Abbas, Président de l’Autorité palestinienne, sera soumise au vote du Conseil de sécurité, un veto américain restant évidemment toujours possible. Ce texte demande le retrait israélien complet, dans les deux ans, des territoires palestiniens occupés depuis 1967.

Même si les marges de manœuvre diplomatique se révèlent étroites, tout vote symbolique en faveur de la reconnaissance de l’État palestinien aux côtés de l’État israélien – dont toutes les parties doivent reconnaître l’existence et le droit à la sécurité – marque un pas en avant. Le nombre croissant de tels votes a des chances d’insuffler un regain de détermination chez les dirigeants des pays qui composent l’Union européenne pour passer des mots aux actes.

La France a le devoir de s’engager

Pour toutes ces raisons, et parce que la France se grandirait à s’engager enfin sur cette voie, j’ai déposé au Sénat le 23 octobre, une proposition de résolution sur la reconnaissance de l’Etat de Palestine, résolution signée par l’ensemble des membres du Groupe écologiste. L’idée est de créer une dynamique, de sensibiliser les groupes d’autres couleurs politiques, de les inciter eux aussi à franchir ce pas, malgré les pressions déjà exercées par l’ambassade d’Israël à Paris, des pressions dont on peut penser qu’elles ne se relâcheront pas.

Nous, démocrates européens, n’avons pas d’autres moyens que symboliques pour faire entendre au gouvernement israélien l’urgence d’ouvrir des négociations bilatérales avec un partenaire, les Palestiniens, qui doit être tenu en tous points pour un égal. Le silence est une manière de reporter à plus tard la question, quitte à mettre en danger l’Etat israélien lui-même, dans un contexte proche-oriental globalement plus explosif que jamais. Reconnaître l’Etat de Palestine est une manière de dire clairement non à l’idéologie messianico-expansionniste qui anime une partie de la population israélienne ainsi que la coalition formée autour de Benyamin Netanyahu.

Aucune arme, aucune guerre n’ont jamais fait ployer la volonté des peuples de s’émanciper. L’histoire en témoigne amplement. Et la proposition de résolution dont le texte est reproduit ci-dessous, si elle était votée, engagerait la France et son gouvernement à agir avec plus de détermination que jamais pour inciter les deux parties à rouvrir des négociations pour une paix viable.

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