TRIBUNE (JDD). « Refusons la tenue de la COP25 à Santiago sous la menace des balles! »

Une centaine d’élus et intellectuels appellent dans cette tribune à boycotter la COP25, le sommet des Nations unies sur le changement climatique, qui doit avoir lieu début décembre au Chili, un pays traversé par une crise sociale qui a déjà fait 18 morts.

Les violences ont déjà fait 18 morts au Chili.
Les violences ont déjà fait 18 morts au Chili. (Reuters)

Le 2 décembre prochain, la capitale du Chili, Santiago, doit accueillir la COP25, le sommet des Nations unies sur le changement climatique. Dans cette tribune, 103 élus et intellectuels, dont Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise), Olivier Besancenot (Nouveau parti anticapitaliste) et David Cormand (Europe écologie – Les Verts), appellent à boycotter l’événement. « La COP25 ne saurait se tenir dans un pays en état de siège, dans une ville soumise au couvre-feu militaire, dans un Chili où manifester pour des conditions de vie dignes peut valoir la mort », expliquent les 103 signataires, qui ont également lancé une pétition.

Voici leur tribune : « A António Guterres, secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies

À Patricia Espinosa, secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

Monsieur, Madame,

Le Chili connaît actuellement un mouvement social de très grande ampleur. Le gouvernement a décrété l’état d’urgence dans plusieurs régions du pays, déléguant ainsi le maintien de l’ordre aux autorités militaires, et a instauré un couvre-feu. Le pouvoir a ainsi fait le choix d’une répression brutale. À ce jour, on déplore 18 morts et plus de 2000 arrestations.

Les femmes et les hommes qui protestent sont accusés par le Président Piñera « d’avoir fomenté une guerre », alors qu’elles et ils manifestent contre des mesures d’augmentation du ticket de métro dans une ville, Santiago, devenue irrespirable du fait de la pollution automobile. Ces personnes ont été traitées comme des délinquantes alors qu’elles contestaient – comme en Équateur, au Liban, au Soudan, en Égypte, ou encore en France – les conséquences des politiques néo-libérales autoritaires qui jettent dans la pauvreté et dans la lutte quotidienne pour la survie, des millions de personnes. Ces femmes et ces hommes désignés comme « terroristes » n’ont pourtant fait que s’indigner de leurs conditions de vie. Leur mobilisation pour une vie digne est un exemple pour les générations futures.

La COP25 ne saurait se tenir dans un pays où manifester pour des conditions de vie dignes peut valoir la mort

Obnubilés par les enjeux de profit à court terme, les États et les entreprises multinationales restent insensibles aux innombrables cris d’alarme des populations, tant en matière de justice sociale que de justice climatique, alors que les investissements nécessaires pour remédier à la crise écologique devraient être une priorité. Le financement de ces politiques en faveur du climat et de la vie devrait se faire à proportion des moyens de chacun, sur des bases de justice, tandis que nous vivons aujourd’hui un processus de concentration de la richesse insupportable.

La lutte contre le changement climatique ne doit pas se faire au détriment des plus fragiles. C’est, et vous le savez pour l’avoir souvent dit, l’un et l’autre, l’un des enjeux de la COP 25 : qui doit financer les politiques publiques de lutte contre la crise climatique?

La COP25 ne saurait se tenir dans un pays en état de siège, dans une ville soumise au couvre-feu militaire, dans un Chili où manifester pour des conditions de vie dignes peut valoir la mort. Nous vous demandons d’agir pour que cessent ces violences militaires et policières. Dans la dramatique situation actuelle, provoquée par les mesures répressives mises en place par le gouvernement chilien, nous, initiateurs et signataires de cette pétition, estimons que le Chili ne peut accueillir dans ces circonstances la COP25.

Ce serait cynique et caricatural d’organiser la COP25 sous la menace des balles d’une armée qui s’est funestement illustrée sous la dictature d’Augusto Pinochet

Nous vous demandons Monsieur le secrétaire général, Madame la secrétaire exécutive, de le signifier au gouvernement chilien et de prendre les mesures adéquates. Nous, initiateurs et signataires, appelons solennellement au boycott du Chili comme pays hôte de la COP25.

Justice sociale et justice climatique sont liées indissolublement. Ce serait cynique et caricatural d’organiser la COP25 sous la menace des balles d’une armée qui s’est funestement illustrée sous la dictature d’Augusto Pinochet. Ce serait une faute de faire ainsi un chèque en blanc à un gouvernement qui a décidé de réprimer avec la pire des brutalités celles et ceux qui veulent que le système change pour le bien commun. Ce serait un soutien à un gouvernement qui a violé dans un même mouvement les droits à une vie digne, les libertés fondamentales et les droits humains.

Nous sommes sûrs que vous vous ferez les messagers de cette pétition auprès des pays membres de l’Organisation des Nations Unies. Nous vous prions de croire, Monsieur le secrétaire général, Madame la secrétaire exécutive, à nos sentiments respectueux. »

Liste des 103 premières personnes signataires :

  1. Ali Aguado, militant pour les droits des personnes LGBTQI+
  2. Eliane Assassi, sénatrice communiste
  3. Jean-Christophe Attias, universitaire
  4. Marianne Auffret, élue municipale
  5. Clémentine Autain, députée FI
  6. Rusen Aytac, avocate
  7. Sébastien Barles, Marseille en commun
  8. Esther Benbassa, senatrice EELV de Paris
  9. Ugo Bernalicis, député FI
  10. Olivier Besancenot, militant révolutionnaire, NPA
  11. Martine Billard, ancienne députée
  12. Fred Bladou, activiste SIDA
  13. Michel Bock, maire adjoint honoraire de Guyancourt
  14. Nathan Boumendil, activiste SIDA
  15. Arthur Cahn, auteur
  16. Christian Camerlynck, chanteur
  17. Erika Campelo, co-présidente de Autres Bresils
  18. Damien Carême, eurodeputé EELV
  19. Rolando J. Carmona, commissaire d’art
  20. Leila Chaibi, eurodeputée FI
  21. Florian Chavanon, chef d’édition
  22. Cécile Ciekerman, sénatrice communiste
  23. Alexis Corbière, député FI
  24. David Cormand, eurodeputé, secrétaire national d’EELV
  25. Ricardo Coronado, militant écologiste
  26. Sergio Coronado, ancien député EELV, Pour une écologie populaire et sociale (PEPS)
  27. Laurence Debril, journaliste
  28. Laurence De Cock, enseignante
  29. Edouard Denouel, fonctionnaire, Bagnolet en Commun
  30. Philippe Donadieu, éleveur
  31. Philippe Doux-Laplace, journaliste
  32. Matthieu Dupas, maître de conférence
  33. Gabrielle Durana, directrice d’association
  34. Konstantinos Eleftheriadis, professeur
  35. Cayetano Espinosa, cinéaste
  36. Patrick Farbiaz, Pour une écologie populaire et sociale
  37. Gwen Fauchois, activiste et blogueuse
  38. Elsa Faucillon, députée communiste
  39. Caroline Fesselier, professeur des écoles, militante insoumise
  40. Caroline Fiat, députée FI
  41. Fabien Gay, sénateur communiste
  42. Guillaume Gontard, sénateur de l’Isère
  43. Hervé Hamon, écrivain
  44. Anne Lise Hering, responsable de bibliothéque
  45. Frederic Hocquard, maire-adjoint de Paris
  46. Vincent Jarousseau, photographe-documentaire
  47. Marion Jobert, juriste franco-chilienne
  48. Samy Khaldy, conseiller fédéral EELV
  49. Bastien Lachaud, député FI
  50. Geoffroy de Lagasnerie, philosophe et sociologue
  51. Thomas Lalire, expert en politiques publiques
  52. Jean-Charles Lallemand, militant pour le climat et l’écologie sociale
  53. Mathilde Larrere, historienne
  54. Cécile Lavergne, conseillère consulaire de Colombie
  55. Stéphane Lavignotte, théologien protestant, militant écologiste
  56. Pierre Lebret, consultant
  57. Cy Lecerf-Maulpoix, journaliste
  58. Gildas Le Dem, journaliste
  59. Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice de Paris
  60. Thomas Linard, militant
  61. Francois Longerinas, journaliste, écologiste insoumis
  62. Noël Mamère, ancien député écologiste
  63. Gilles Martinet, doctorant
  64. Alexis Mazade, adjoint au maire de Tremblay-en-France
  65. Jean-Luc Mélenchon, député FI
  66. Gilles Monsillon, écologiste insoumis
  67. Ricardo Montserrat, écrivain
  68. Benedicte Monville, conseillère régionale FI
  69. Corinne Morel Darleux, auteur, conseillère régionale Auvergne-Rhônes Alpes
  70. Danielle Obono, députée FI
  71. Mehet Ozguner, étudiant
  72. Mathilde Panot, députée du val de Marne, vice-présidente du groupe France Insoumise
  73. Anne Pauly, journaliste et auteure
  74. Yann Pedler, avocat
  75. Manuela Picq, journaliste
  76. Cassandre Pinto, enseignante
  77. Claudio Pulgar Pingaud, architecte urbaniste
  78. Adrien Quatennens, député FI
  79. Jean-Hugues Ratenon, député FI
  80. Giovanna Rincon, directrice d’Acceptess-T, militante pour les droits des personnes LGBTQI+
  81. Michele Rivasi, eurodéputée EELV
  82. Lucas Rochette-Berlon, étudiant, cadre associatif, militant écolo
  83. Christian Rodriguez, militant internationaliste
  84. Gilbert Roger, sénateur de Seine-Saint-Denis
  85. Barbara Romagnan, ancienne députée, Génération.s
  86. Roberto Romero, conseiller régional, Génération.s
  87. Sabine Rubin, députée FI
  88. Michele Rubirola, conseille départementale écologiste
  89. Anne de Rugy, militante écologiste
  90. Eros Sana, journaliste
  91. Judith Silberfeld, militante LGBTQI+
  92. Karine Solene Espineira, sociologue, militante transfeministe
  93. Sophie Taillée-Pollan, sénatrice du Val-de- Marne, Génération·s
  94. David Thomas, journaliste, militant insoumis
  95. Benjamin Toix, militant pour les droits des personnes LGBTQI+
  96. Marie Toussaint, eurodéputée EELV
  97. Valerie Sandrossian, responsable en collectivité territoriale
  98. Herve Segata, comédien
  99. Pierre Serne, conseiller régional, porte-parole de Génération·s
  100. Gabriel Serville, député de Guyane
  101. Luc Stanescou, architecte
  102. Rabaté Ulysse, élu local, président d’association
  103. Stéphan Vernhes, activiste dans le la lutte contre le VIH