Soirée des étudiants policiers à Nîmes : «Ces élèves seront exclus», confirme Darmanin

1er novembre 2020 | Le Parisien

Mercredi soir, une centaine d’élèves de l’école nationale de police participaient à une soirée animée. Des insultes et des sifflements ont fusé à l’arrivée de policiers sur les lieux. L’affaire fait du bruit jusqu’au sommet de l’Etat.

La perspective du reconfinement a donné quelques envies aux plus fêtards, désireux de profiter jusqu’au bout. Et si le sens des responsabilités constitue une valeur essentielle de leur formation, de jeunes étudiants policiers n’ont visiblement pas fait exception. Au point que leur fête à Nimes, mercredi soir, est remontée jusqu’au plus haut sommet de l’Etat.

« Ces élèves seront exclus, a répété ce matin sur BFM Gérald Darmanin. On ne peut pas être policier et se moquer des règles qu’on impose aux autres, tance le ministre de l’Intérieur. Sur la base évidemment de preuves, j’excluerai ces élèves de l’uniforme de la police nationale».

Dimanche après-midi, il s’était fendu d’un tweet pour dénoncer lui-même une « soirée clandestine organisée en plein confinement » (ce qui n’était pas techniquement le cas, NDLR). « Si ce fait est avéré, les élèves responsables ne seront pas dignes de porter l’uniforme et seront exclus. Pour être respecté il faut être respectable », poursuit le ministre.

Ce mercredi 28 octobre, les équipes de la brigade canine de Nîmes, installés dans les locaux de l’école de police de la ville, rejoignent comme tous les soirs le chenil afin de détendre les chiens et nettoyer leurs box. Mais cette fois, la fin de journée sera plus animée que d’ordinaire. Il est environ 21h20, le couvre-feu est entré en vigueur, mais les équipes cynophiles sont surprises par une agitation ambiante pour le moins inhabituelle.

Des « hurlements » et une musique « anormalement forte » semblent provenir des abords du stade de l’école. Les agents de la brigade cynophile décident d’équiper un chien et se dirigent en voiture vers le poste de garde. Dans la descente du stade, ils font face à une scène pour le moins surprenante.

Insultes et sifflements

Une centaine d’étudiants sont en train de faire la fête, dehors. La musique est à fond, des attroupements de jeunes se forment de chaque côté de la route et sur le stade. Le véhicule de la brigade canine avance vitres ouvertes et est rapidement pris à partie. Des insultes et des sifflements fusent.

D’après un agent intervenu sur place, au moins une cinquantaine d’élèves auraient ainsi participé aux débordements.

« Ara! Ara! », crient certains élèves. Pour les non initiés, il s’agit d’un signal fréquemment utilisé par les guetteurs de cités pour prévenir les dealers de l’arrivée des forces de l’ordre… »

Enquête administrative ouverte

Les agents de la brigade cynophile décident de descendre de leur véhicule. Ils disent constater « un mouvement de foule » en leur direction « les individus pour la plupart encapuchés continuant de vociférer en notre direction », déclarent-ils. « Vu la menace de ces jeunes individus dépourvus de toute éducation », selon leurs propres mots, ils ajoutent avoir décidé de sortir le chien qui était dans le véhicule pour disperser l’attroupement, sans que l’animal n’ait à intervenir formellement.

L’incident a fait du bruit dans les rangs de la police. Selon nos informations, le directeur de la police nationale a déclenché une enquête administrative pour déterminer la responsabilité des participations et décider des sanctions éventuelles.

« Vous faites honte à notre institution »

Sur les réseaux sociaux, des agents s’indignent des images diffusées et se désolidarisent totalement des agissements des élèves de l’école de police. « Vous faites honte à notre institution, vous n’êtes pas dignes de l’uniforme. Une seule réponse à ce comportement qui me débecte : la révocation », a publié sur Twitter le compte « Juliette Alpha », bien suivi dans le milieu.

Au sein de la hiérarchie policière, certains tiennent tout de même à nuancer le caractère « clandestin de la soirée », qui aurait été improvisée. Ils rappellent les étudiants se trouvaient sur le parking et que comme tout jeune de 20 ou 25 ans, encore plus lorsque la pression est forte, l’envie de se changer les idées peut parfois prendre le dessus.

Ce n’est pas la première fois que cette école fait parler d’elle. En juillet 2020, le syndicat policier Vigi disait avoir reçu des témoignages faisant état de soupçons de propos racistes tenus par certains membres de l’école. Ses représentants, disant ne pas être écoutés par l’institution, expliquaient avoir alerté la sénatrice EELV Esther Benbassa. Dans le cadre des questions au gouvernement, cette dernière avait déposé le 6 août dernier une question au ministre de l’Intérieur dans laquelle elle évoquait notamment le cas d’une étudiante qualifiée de « brillante », qui aurait été victime de racisme et aurait vu sa situation au sein de l’établissement se dégrader. Dans sa question, la sénatrice demandait au ministre « de prendre des mesures dans les établissements de formation des forces de l’ordre, afin que leurs effectifs soient davantage sensibilisés aux discriminations », et « de protéger avec plus d’efficacité les agents et élèves du corps de policiers, victimes d’injures, de propos et d’actes racistes au cours de leur formation ». Elle n’a pas eu de réponse du gouvernement.

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