« Signal fort », « réussite française »… Les sénateurs applaudissent Annie Ernaux, prix Nobel de littérature 2022

Quelques heures après l’attribution du Nobel de littérature à Annie Ernaux, les réactions enthousiasmées se sont multipliées au sein de la Chambre Haute, en particulier du côté de la gauche sénatoriale. Dans un communiqué, la délégation aux droits des femmes se félicite de voir récompensée une écrivaine qui a placé au cœur de son œuvre « la condition féminine mais aussi de grandes problématiques sociales ».

La Française Annie Ernaux a reçu jeudi 6 octobre le prix Nobel de Littérature. À 82 ans, cette ancienne professeure de lettre, proche de l’extrême gauche et régulièrement citée comme modèle par les militantes féministes, a publié depuis le début des années 1970 une vingtaine de romans, d’inspiration autobiographique, et retraçant le parcours intime d’une femme à travers les bouleversements qu’a connu la société française durant le dernier tiers du XXe siècle. Le comité Nobel a notamment salué « le courage et l’acuité clinique avec lesquels elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle ». Une consécration qui tombe presque cinq ans jour pour jour après le lancement du mouvement #MeToo, alors que l’actualité des derniers mois a notamment été agitée par le recul du droit à l’avortement aux Etats-Unis et, ici en France, plusieurs affaires de violences sexistes et sexuelles.

« Ce prix Nobel est un signal fort en faveur du féminisme, de l’égalité entre les femmes et les hommes et de l’IVG », se félicite auprès de Public Sénat la sénatrice UDI Annick Billon, présidente de la délégation au droit des femmes. « C’est une écrivaine incontournable de notre littérature depuis 50 ans, souvent engagée, résolument féministe. Deux de ses écrits majeurs concernent, pour l’un l’avortement [L’Evènement, 1983], pour l’autre les étapes de son engagement de femme [Les Années, 2008], souligne l’élue. Dans un communiqué, la délégation sénatoriale aux droits des femmes salue « le choix du jury du Prix Nobel de récompenser une romancière dont les récits, souvent autobiographiques, traitent de la question de la condition féminine mais aussi de grandes problématiques sociales ».

« Le Nobel à Annie Ernaux, la révoltée ! Une grande joie, oui, que de voir ce prix distinguer plus que la France, plus que les femmes : la littérature même, en ce qu’elle a de plus beau et de meilleur, parce qu’elle réveille les consciences », a tweeté la sénatrice Esther Benbassa. « Mille bravos à Annie Ernaux ! En décernant ce prix à cette grande écrivaine le jury a envoyé un signal très fort à toutes les femmes, jeunes et moins jeunes, qui partout sur la planète se battent pour l’égalité, la justice et la liberté », note dans un tweet Éliane Assassi, la présidente du groupe communiste à la Chambre haute. Son collègue Fabien Gay, outre « la qualité de son écriture », évoque « ses engagements pour les luttes populaires ».

Rayonnement français

Cette nouvelle tombe 24 heures après l’attribution du Nobel de physique au Français Alain Aspect, conjointement avec l’Américain John F. Clauser et l’Autrichien Anton Zeilinger, pour leurs travaux sur « l’intrication quantique ». L’année 2022 apparaît donc comme un très bon cru pour la France qui, en 121 ans, a glané 66 Nobel dont 16 pour le seul prix de littérature. « Quelle formidable nouvelle qui vient récompenser une écrivaine de talent et engagée. Avec Alain Aspect, ces Nobel 2022 témoignent de la réussite française et de son influence dans le monde », s’est enthousiasmée dans un tweet la sénatrice socialiste Hélène Conway-Mourray, ancienne ministre des Français de l’étranger. « La littérature française brille encore avec Annie Ernaux et ce Prix Nobel de littérature. Première Française à recevoir cette distinction ! Félicitations à elle pour ses œuvres et son combat pour le féminisme et la justice sociale », applaudit son collègue Rémi Cardon. « Ces deux prix Nobel confirment que la France est regardée dans le monde et qu’elle est inspirante », abonde encore Annick Billon.

« Le monde n’est pas pourri », a sobrement commenté, également sur Twitter, la sénatrice EELV Mélanie Vogel, au lendemain d’une intervention remarquée à la tribune sur la répression du mouvement de contestation iranien, déclenché par la mort d’une étudiante de 22 ans, mise en garde à vue par la police des mœurs pour un voile « mal mis ».

« Faut-il séparer l’œuvre de son auteur ? C’est impossible »

Issu des rangs de la gauche, le sénateur macroniste Julien Bargeton concède ne pas nécessairement partager les idées d’Annie Ernaux, mais ne boude pas pour autant son plaisir de lecteur : « J’apprécie plus ses livres que sa personnalité et ses convictions. Faut-il séparer l’œuvre de son auteur ? C’est impossible. Ou alors, imparfaitement. N’empêche que Les années, celui que je préfère, est un livre magnifique », concède-t-il.

Soutien d’Éric Ciotti dans la course à la présidence des Républicains, la sénatrice des Alpes-Maritimes Alexandra Borchio-Fontimp indique pour sa part « se réjouir de voir cette formidable romancière française reconnue à travers le monde ».

Source : https://www.publicsenat.fr/article/societe/signal-fort-reussite-francaise-les-senateurs-applaudissent-annie-ernaux-prix-nobel