S’ils étaient votés, ces textes auraient avant tout une portée symbolique, mais quel symbole! En une semaine, plusieurs propositions de résolution ont été déposées sur les bureaux des présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat pour demander la reconnaissance par la France de l’Etat palestinien. Toutes à l’initiative de parlementaires de gauche.

Mercredi dernier, la sénatrice EE-LV Esther Benbassa a ouvert la voie, souhaitant dans son texte «que le gouvernement français reconnaisse sans délai l’Etat palestinien souverain et démocratique sur la base des lignes de 1967, avec Jérusalem comme capitale des deux États». Le même jour, les députés Front de gauche ont écrit à Claude Bartolone pour qu’il inscrive à l’ordre du jour leur proposition de résolution datant de 2012. Et mardi, le sénateur PS, Gilbert Roger, a obtenu le feu vert de son groupe pour faire de même tandis que les députés socialistes préparent aussi leur  proposition de résolution. «Il y a une course à l’échalote, tant mieux», sourit Gilbert Roger.

La reconnaissance de la Palestine par le Parlement britannique, le 13 octobre, puis par la Suède le 30 octobre et la perspective d’un vote au Parlement espagnol ont poussé les sénateurs et députés de gauche à relancer le sujet. «La France ne peut rester en retrait», invoquent les députés du Front de gauche. Les auteurs de ces propositions de résolution estiment que l’opération «Bordure protectrice» lancée cet été par Israël sur le territoire enclavé de la bande de Gaza, l’échec du processus de paix et la «poursuite de la colonisation» plaident plus que jamais pour la reconnaissance d’un Etat palestinien. «Puisque le processus de paix est au point mort, on ne voit pas d’autre issue que la pression internationale», explique François Asensi (PCF).

Dans une tribune publiée ce mercredi sur Libération, 17 parlementaires socialistes – dont les anciens ministres Benoît Hamon et François Lamy – disent par ailleurs redouter que «le jour approche où le processus de colonisation rendra irréversible tout processus de paix». Et estiment qu’«une paix juste et durable dans la région ne sera possible que par une solution négociée entre deux Etats indépendants». «La grande majorité» des députés PS – qui en ont débattu mardi en réunion de groupe – est désormais sur cette ligne, selon le président du groupe d’amitié France-Palestine, Michel Issindou. Idem au sein du groupe PS au Sénat qui a approuvé l’idée d’une proposition de résolution: «il n’y a eu que quatre abstentions», se réjouit Gilbert Roger.

Un des 60 engagements de Hollande

Reste à convaincre l’exécutif. Même si le candidat François Hollande s’est engagé durant la campagne de 2012 à soutenir «la reconnaissance internationale de l’État palestinien», le sujet est de toute évidence ultra-sensible. Comme le laissait entendre Laurent Fabius en promettant mi-octobre que la France reconnaîtrait l’État palestinien «le moment venu», à condition que cela soit «utile à la paix» et pas seulement «symbolique».

Le ministre des Affaires étrangères reçoit ce mercredi soir une délégation de parlementaires. Un signe positif pour Gilbert Roger: «J’imagine que s’il souhaite nous voir, c’est pour que l’on coordonne nos actions à l’Assemblée et au Sénat et pour   travailler à une même rédaction.» La présidente de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée, Élisabeth Guigou, a déjà planché sur une première version provisoire qui affirme: «l’Assemblée invite le gouvernement français à faire de la reconnaissance de l’État de Palestine un instrument pour obtenir un règlement définitif du conflit».

Il s’agirait de s’entendre sur une formulation et un tempo qui n’embarrassent pas le gouvernement français. L’ambassadeur d’Israël en France a, de son côté, adressé un courrier aux sénateurs le 28 octobre pour les prévenir que «toute reconnaissance unilatérale serait contre-productive». Et lorsque la Suède – premier pays de l’UE – a reconnu l’Etat Palestinien, Israël a rappelé illico son ambassadeur.

Les partisans d’un Etat palestinien entrevoient une fenêtre pour en débattre au Sénat le 11 décembre, lors d’une niche parlementaire. La conférence des présidents de la Haute-Assemblée doit se prononcer, ce jeudi en début de soirée, sur l’inscription de l’une des propositions de résolution à l’agenda.

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