Prostitution: le Sénat vote contre la pénalisation des clients (L’express, 9 juillet 2014)

La commission spéciale du Sénat a voté mardi en faveur de la suppression du volet sur la pénalisation des clients, inscrit dans la proposition de loi renforçant la lutte contre la prostitution. 

C’était l’un des piliers de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la prostitution. La commission spéciale du Sénat a supprimé ce mardi le volet sur la pénalisation des clients, qui prévoyait de punir l’achat d’actes sexuels d’une contravention de 1500 euros.

Cette partie de la loi avait plusieurs fois fait l’objet de réserves. Le sénateur PS et président de la commission, Jean-Pierre Godefroy, avait notamment émis des doutes à ce propos. La ministre de la Justice, Christiane Taubira, s’était également dite « sensible aux inquiétudes des associations de terrain qui redoutent des effets pervers sur la sécurité et la santé des personnes concernées », lors de son audition par la commission spéciale, le 2 juillet dernier, comme le rapporte Le Monde.

 

La suppression a été votée par 16 voix pour, contre 12 favorables et 2 abstentions, a indiqué la sénatrice Esther Benbassa, membre de la commission.

Précarisation des prostituées

« Nous avons mis en avant la précarisation des prostituées que la pénalisation entraînerait forcément, avec des clients plus rares qui pourraient imposer leurs désirs et des prostituées obligées de se cacher. L’exemple de la Suède nous montre que cela ne fonctionne pas », a affirmé Esther Benbassa.

En Suède, la pénalisation des clients est effective depuis 1999. C’est sur ce modèle que s’appuie la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, pour mettre en oeuvre la proposition de loi.

Mais, l’initiative suédoise aurait eu tendance à stigmatiser de manière encore plus nette les prostituées. Certaines travailleuses du sexe éviteraient désormais de signaler à la police les violences dont elles victimes, comme l’indique un article publié par Slate sur les effets de la loi suédoise.

Un coup dur pour les partisans de la pénalisation des clients

La pénalisation des clients peut cependant revenir par un amendement en séance au Sénat.

Mais la proposition de loi, déjà adoptée en décembre par l’Assemblée nationale, n’est pas encore programmée au Sénat et après ce vote, Esther Benbassa estime qu’il ne sera « pas programmé en séance ».

Pour les partisans de la pénalisation des clients, cette décision du Sénat est un coup dur. Dans un communiqué, deux députées PS membres de la commission spéciale « système prostitutionnel » de l’Assemblée nationale, Maud Olivier et Catherine Coutelle, ont estimé que « si la loi ne prend pas en compte la nécessité de réduire la demande autant que les autres aspects, la loi ne sera pas efficace. »

Le texte comprend également l’abrogation du délit de racolage et des mesures d’accompagnement social et professionnel pour celles qui veulent quitter la prostitution, que le Sénat a renforcé, a indiqué Esther Benbassa.

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