Par Michel Veron
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Depuis l’élection de François Hollande, les socialistes n’évoquent plus le droit de vote des étrangers. D’autant que sans la majorité des 3/5 au Parlement, le PS pourrait être amené à reculer.
La gauche a tous les pouvoirs. Tous sauf un: elle ne dispose pas d’une majorité de 3/5e des sièges au Parlement. Si cela ne gênera aucunement Jean-Marc Ayrault qui dispose de la majorité absolue à l’Assemblée nationale pour mener à bien l’action du gouvernement, François Hollande pourrait lui ne pas pouvoir réaliser les réformes constitutionnelles qu’il a portées durant sa campagne.
En effet, toute modification de la Constitution nécessite une majorité de 3/5e des membres du Parlement. Il y a 925 parlementaires (577 députes et 348 sénateurs). Il faut donc théoriquement 555 parlementaires.
Or le PS dispose de 279 députés auxquels s’ajoutent 52 autres apparentés (divers gauche) et alliés (EELV ou PRG). On peut également ajouter les 10 députés Front de gauche. A l’Assemblée nationale, François Hollande peut donc compter sur les voix de 341 députés.
Au Sénat, le groupe PS est composé de 129 membres. En additionnant les voix du groupe écologistes (11 sénateurs), du groupe communistes (21 sénateurs) et celles du groupe RDSE (17 membres composé d’une dizaine de radicaux de gauche, d’anciens socialistes et de quelques centristes), on obtient 178. En comptant large, François Hollande peut donc revendiquer les voix de 519 parlementaires.
« Il faudra regarder texte par texte »
Le ministre chargé des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, explique cependant que ce nombre est loin d’être fixe. « Il faudra regarder texte par texte. Il sera possible de recueillir des voix au-delà de la gauche », explique-t-il. En effet, sur les textes consensuels comme l’inscription de la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution, le président de la République peut envisager de rallier les voix des radicaux de droite, voire celles de parlementaires UMP.
En revanche, sur le droit de vote des étrangers, on imagine mal François Hollande obtenir suffisamment de voix pour faire voter cette réforme constitutionnelle. « Cela demandera au préalable la vérification des positions de chacun », note prudemment Alain Vidalies.
« On n’a pas les 3/5e mais il y a les centristes et les humanistes de l’UMP », observe de son côté la vice-présidente du Sénat Bariza Khiari qui demande « un mois » pour « mettre le sujet sur la table ». Selon elle, le PS « est décidé » à faire adopter cette réforme « sur laquelle il a fait campagne » car c’est « une mesure de justice ».
Autre solution: si une partie de l’opposition s’abstient, le seuil des 3/5e diminue proportionnellement au nombre de parlementaires ne prenant pas part aux votes. Mais une abstention bienveillante de la droite sur ce sujet est peu probable, l’UMP ayant agité durant la période électorale cette promesse de François Hollande comme une « menace pour la cohésion nationale ».
Depuis l’installation du gouvernement, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault n’a pas évoqué le droit des vote des étrangers. « Je ne sais pas si ce silence est politiquement parlant » s’interroge la sénatrice écologiste Esther Benbassa. Faute d’adoption par la voie parlementaire, le président a prévu un référendum sur un sujet où une majorité peut être trouvée à en croire certains sondages.
Mais au gouvernement, certains doutent de ces sondages, et notamment Manuel Valls: « c’est un thème qui nous a fait perdre 2 points entre les deux tours de la présidentielle, en donnant à des électeurs du FN une raison de revoter pour Sarkozy », rapporte Le Point. D’où l’hostilité du ministre de l’Intérieur de recourir à un référendum dont il craint l’échec: « On connaît d’avance le résultat! » glisse-t-il laconiquement.
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