PPL visant à protéger les victimes de violences conjugales

21 juillet 2020 | Sénat

Mardi 21 juillet, Esther Benbassa intervenait en tant qu’oratrice pour le groupe CRCE lors de la discussion générale sur la PPL visant à protéger les victimes de violences conjugales.

Monsieur le Président,

Madame la Secrétaire d’Etat,

Madame la Rapporteure

Mes CherEs collègues,

Cette proposition de loi visant à réprimer les violences conjugales a fait l’objet d’une commission mixte-paritaire conclusive. Les mesures votées devraient bientôt intégrer le droit positif et nous ne pouvons que nous en réjouir.

Nous notons tout d’abord que les articles concernant l’ordonnance de protection ont été supprimés, dans la mesure où un décret du 3 juillet 2020 est venu renforcer son obtention.

Les travaux de la CMP n’ont cependant pas été de nature à améliorer le texte tel qu’il était sorti du Sénat.

Le champ d’application de l’article 7 ter a notamment été restreint. Son dispositif initial ouvrait le droit à la victime ayant porté plainte pour violence conjugale de bénéficier d’un préavis réduit à un mois, afin qu’elle puisse quitter le logement qu’elle occupait avec son conjoint violent. La CMP a malheureusement ajouté la nécessité qu’une ordonnance de protection soit obtenue par la victime afin qu’elle puisse disposer de ce mécanisme, arguant que sans ce garde-fou, n’importe qui pourrait porter plainte afin de quitter son logement dans les plus brefs délais. Nous ne pouvons nous satisfaire de cette mesure en demi-teinte, qui jette un voile de suspicion sur les victimes présumées.

Nous déplorons par ailleurs que lors de son passage dans notre Chambre, tant le Gouvernement que la droite sénatoriale aient refusé de doter cette proposition de loi d’un volet préventif.

Tous nos amendements ont en effet été balayés sans véritables arguments de fond et sans volonté de débattre des thématiques que nous avons soulevées.

Ainsi continuerons-nous à défendre la nécessité de sensibiliser les policiers, médecins et magistrats aux violences faites aux femmes. De même, nous estimons toujours essentiel qu’un accompagnement social et psychologique soit apporté aux conjoints violents afin de soigner ceux qui peuvent l’être.

Prévenir et soigner : tels devraient être la mission du droit en matière de violences intrafamiliales. Réprimer les actes délictueux et criminels commis au sein des couples est nécessaire mais ne saurait suffire.

Enfin, nous souhaitons une fois de plus attirer l’attention de l’exécutif sur le manque de moyens attribués aux actions gouvernementales en faveur de l’égalité femmes-hommes et pour l’aide aux victimes de brutalités sexuelles et sexistes. Dans son PLFR 3, le Gouvernement a souhaité augmenter le budget en la matière de 4 millions d’euros. Nous sommes toujours bien loin des 1 milliard demandés par le Haut Conseil à l’égalité !

Malgré ses lacunes, la plupart des dispositions prévues dans ce texte vont dans le bon sens. Comme nous avions eu l’occasion de le dire en première lecture, nous saluons par exemple les mesures prévues aux articles 3 et 11 A, susceptibles d’accroître la sécurité des mineurs. Il en va de même pour les dispositifs garantissant le respect de la vie privée numérique des victimes, prévus aux articles 10 et 10 bis. Ces éléments introduisent dans le XXIe siècle la lutte contre les violences faites aux femmes, ces dernières étant désormais régulièrement victimes de cyber-harcèlement et de maltraitances numériques.

Bien que nous n’ayons pas été entendus sur certains sujets, nous ne nions pas le bénéfice que représenterait l’adoption de cette proposition de loi pour les victimes de violences physiques et morales dans un cadre conjugal.

En conséquence, le groupe CRCE votera POUR ce texte. Gardons à l’esprit tout le travail qu’il nous reste à accomplir afin que les coups, les menaces et tous ces actes néfastes qui se concluent bien trop souvent en féminicides ne soient plus si fréquents.

Je vous remercie.