Par Sylvain Mouillard.
» Les sénateurs ont entamé ce lundi l’examen du projet de loi sur le mariage homosexuel dans un climat tendu. Depuis deux semaines, certains opposants s’en prennent sans retenue aux élus favorables au texte : interruptions de débats, menaces, vandalisme… les actions coup de poing se multiplient. Le «Printemps français», un groupuscule aux contours flous, apparaît en première ligne. Ce mouvement, qui se définit comme «spontané et populaire, profondément pacifique», revendique surtout une stratégie «moins Bisounours» que celle du collectif «La manif pour tous».
Un positionnement qui n’est pas du goût de Frigide Barjot. A plusieurs reprises, la porte-parole de «La Manif pour tous» a pris ses distances avec le «Printemps français», dénonçant des actes qui «portent préjudice» à son mouvement. Du côté du PS, on fait bloc contre des attaques «odieuses». Harlem Désir, le premier secrétaire des socialistes, a demandé samedi qu’elles cessent «immédiatement».
Dernier exemple en date, l’action menée sur la devanture de l’espace des Blancs-Manteaux à Paris, où l’Inter-LGBT (Lesbiennes, Gay, Bi,Trans) organisait ce week-end «Le printemps des assoces». Dans la nuit de samedi à dimanche, une vingtaine de militants du «Printemps français» ont recouvert la façade de visuels de la «Manif pour tous» – un pillage du logo selon Barjot -, arrachant également la banderole annonçant les deux jours de débats. La vidéo de l’action, qui a depuis été retirée par le «Printemps français», est tout de même visible sur Internet. Deux plaintes ont été déposées, dont une pour «dégradation de biens publics, action à caractère discriminatoire dans une enceinte municipale et entrave à la liberté d’expression».
Malgré les critiques émises à son encontre, le «Printemps français» ne compte pas baisser la garde, promettant même, selon une interview donnée par sa porte-parole Béatrice Bourges au Figaro, des actions «plutôt costaud». Une opération «Camping pour tous», réunissant les opposants, a lieu régulièrement devant le Sénat. Mardi, le «Printemps français» annonce une «journée sans achats», une manière de ne pas verser de TVA à l’Etat.
«Les opposants ont été pris en otage par des fous d’extrême droite»
Erwann Binet, rapporteur du projet de loi, avait déjà fait les frais du mouvement anti-mariage gay. Le 26 mars, le député socialiste de l’Isère avait été empêché par «des opposants violents» d’achever une intervention à l’université de Saint-Quentin-en-Yvelines. Devant les manifestants, il avait dû partir sous protection policière. Rebelote vendredi soir à la faculté de droit de Saint-Etienne. Pris à partie par des militants d’extrême droite, Binet a depuis annoncé qu’il annulait pour des raisons de sécurité ses prochains débats. «Je le regrette vivement, mais il n’est pas possible de continuer dans ces conditions», a déclaré l’élu isérois, estimant que «les opposants ont été pris en otage par des fous d’extrême droite». De fait, Alexandre Gabriac, le leader des Jeunesses nationalistes, viré du Front national en 2011 après la diffusion de photos le montrant en train de faire le salut nazi, faisait partie des manifestants.
D’autres élus sont la cible d’activistes hostiles au mariage gay. Esther Benbassa, sénatrice EE-LV du Val-de-Marne, a rapporté samedi que les roues et l’arrière de sa voiture avaient été «défoncés». «Je reçois depuis plusieurs jours de nombreuses menaces par téléphone et par mails, ainsi que des dizaines de lettres de mauvais goût à mon bureau au Sénat, a-t-elle précisé à l’AFP. On me dit qu’on va me « casser la gueule »». Côté UMP, c’est Chantal Jouanno, favorable au projet de loi, qui a été «réveillée» par des militants du «Printemps français». Le 4 avril, une soixantaine d’entre eux sont venus manifester sous les fenêtres du domicile de la sénatrice de Paris, aux cris de «un père, une mère, c’est élémentaire». Fin mars, la ministre de la Justice Christiane Taubira avait été chahutée à sa sortie de l’opéra de Lyon. La semaine passée, une permanence parisienne du Parti socialiste avait également été vandalisée. »
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