Le vote des étrangers à la trappe (l’Humanité,14 mars 2013)

Par Max Staat.

 » Bis repetita de 1981 : le Conseil des ministres décide de ne pas mettre le droit de vote des étrangers aux élections locales dans l’ensemble des modifications de la Constitution.

Une absence qui fait et va faire du bruit à gauche. Le Conseil des ministres a proposé, hier, de modifier sur plusieurs points la Constitution (voir ci-dessous). Initialement, la question du droit de vote des résidents étrangers aux élections locales devait en faire partie, conformément au cinquantième engagement du candidat François Hollande lors de la campagne présidentielle de 2012, qui précisait : « J’accorderai le droit de vote aux élections locales aux étrangers résidant légalement en France depuis cinq ans. » Un an plus tard, le gouvernement s’apprête à renoncer purement et simplement à cette promesse du président de la République. Après que le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a fait le tour des groupes de l’Assemblée nationale et des partis politiques, le gouvernement a conclu qu’il sera difficile d’obtenir les 60 % des voix nécessaires lors du Congrès (réunion des députés et des sénateurs) pour changer la Constitution sur ce sujet… La question ne sera donc pas posée.

Pour Esther Benbassa, sénatrice d’Europe Écologie-les Verts (EELV) qui fut, en décembre 2011, la rapporteuse d’un projet de loi sur le vote des étrangers aux élections locales, projet adopté alors par la nouvelle majorité de gauche du Sénat, « il n’est pas acceptable que la droite dicte à la gauche ce qu’elle doit faire ». Alors que son collègue le député (EELV) Denis Baupin se veut plus pragmatique : « Il ne faut pas faire de démagogie, nous n’avons pas la majorité. » De là à renoncer… De son côté, Marie-George Buffet, députée PCF-Front de gauche, appelle le gouvernement à « ne pas reculer » une nouvelle fois. Le premier engagement de la gauche sur cette question date de 1981. Elle appelle à « affronter le débat politique » car, dit-elle, « on ne peut pas parler de citoyenneté, d’intégration, et refuser ce droit aux immigrés. Ce serait une indignité que de ne pas le leur accorder ».

La gauche peut voter le texte à l’Assemblée

Les députés socialistes semblent partagés entre le soutien au gouvernement et la difficulté à assumer ce qui apparaîtra comme un nouveau renoncement. En témoignent les déclarations de Jean-Jacques Urvoas, député (PS) et président de la commission des Lois, qui, répondant à nos questions, donne le sentiment de vouloir encore y croire. Ainsi, dit-il, « puisque ce n’est pas dans les propositions de gouvernement, je souhaite que le texte de loi voté au Sénat vienne à l’Assemblée » où « il peut être voté ». Si, ensuite, explique-t-il, « les trois cinquièmes des voix nécessaires au Congrès ne sont pas atteints », la Constitution « nous donne l’outil du référendum ». Idée, pour l’heure, rejetée par François Hollande.

À droite, le député centriste Jean-Christophe Lagarde, opposé au droit de vote des étrangers, fustige « ce nouveau renoncement » et invite François Hollande à oser « un référendum ». Même son de cloche chez Yves Jégo (UMP), qui explique par ailleurs qu’il n’aura « aucune raison de ne pas voter, a priori, les réformes constitutionnelles proposées » par le gouvernement. À écarter sans combattre les réformes qui fâchent, la gauche gouvernementale risque de rater le changement attendu par les Français.

D’autres points de réforme  D’autres dispositions feront l’objet de projets de loi constitutionnelle. Le président du Conseil supérieur de la magistrature sera désormais élu par ses membres et non plus nommé par l’Élysée. L’immunité du président de la République pourrait également être supprimée dans le domaine civil, mais 
il bénéficiera toujours d’une protection liée à sa fonction. 
La suppression de la Cour de justice de la République est prévue. Les ex-présidents de la République ne seront plus membres de droit à vie au Conseil constitutionnel, sans rétroactivité pour ceux qui y siègent déjà. Enfin, les ministres ne pourront plus cumuler avec une fonction exécutive au sein des collectivités territoriales. »

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