La commission spéciale de l’instance française a adopté mardi la proposition de loi renforçant la lutte contre la prostitution mais supprimé l’un des piliers du texte.
«Après plus de deux heures de discussion», la commission a voté la suppression de cette disposition, qui prévoyait de punir l’achat d’actes sexuels d’une contravention de 1 500 euros, par 16 voix (contre 12 favorables et 2 abstentions), a précisé Esther Benbassa, sénatrice Europe Écologie – Les Verts (EELV). «Nous avons mis en avant la précarisation des prostituées que la pénalisation entraînerait forcément, avec des clients plus rares qui pourraient imposer leurs désirs et des prostituées obligées de se cacher. L’exemple de la Suède nous montre que cela ne fonctionne pas», a affirmé Mme Benbassa.
Conséquences au Luxembourg?
Depuis le début du mois de juin, plusieurs rues de la capitale sont fermées à la circulation entre 19h et 6h du matin, afin de lutter notamment contre les nuisances provoquées par la prostitution. Lors de son premier bilan, la police indiquait que «le/la condamné(e) (NDLR: pour achat d’acte sexuel) a fréquemment déjà quitté le territoire du Grand-Duché» avant que l’avertissement taxé ne leur soit adressé. La décision du Sénat français, si elle est reprise par l’Assemblée nationale, pourrait donc impacter directement la fréquentation des prostituées présentes au Luxembourg.
Plusieurs membres de la commission spéciale, dont le sénateur PS Jean-Pierre Godefroy, président de la commission, avaient fait part à plusieurs reprises de leur réserve sur cette partie du texte. La pénalisation des clients peut cependant revenir par un amendement en séance au Sénat. Mais la proposition de loi, déjà adoptée en décembre par l’Assemblée nationale, n’est pas encore programmée au Sénat et après ce vote, Mme Benbassa estime qu’il ne sera «pas programmé en séance». La proposition de loi se base sur l’exemple suédois qui pénalise les clients depuis 1999.
Risque de seulement déplacer du problème
Le texte prévoit aussi l’abrogation du délit de racolage, des mesures d’accompagnement social et professionnel pour celles qui veulent quitter la prostitution, que le Sénat a renforcé, a ajouté Mme Benbassa. Dans un communiqué commun, deux députées PS membres de la Commission spéciale «système prostitutionnel» de l’Assemblée nationale, Maud Olivier, auteur de la proposition de loi, et Catherine Coutelle, ont souligné que «si la loi ne prend pas en compte la nécessité de réduire la demande autant que les autres aspects, la loi ne sera pas efficace».
Pour les partisans de la pénalisation, dont la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, ceux qui ont recours à la prostitution ne doivent pas ignorer qu’ils alimentent les réseaux criminels. Lors de son audition devant la commission, la ministre de la Justice, Christiane Taubira, avait cependant souligné qu’il ne fallait pas sous-estimer les inquiétudes des associations, qui craignaient de voir les prostituées se retirer dans des lieux plus cachés en cas de pénalisation des clients.
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