Les « Sages », qui avaient été saisis d’une question prioritaire de constitutionnalité, avaient jugé que le délit de harcèlement sexuel n’était pas suffisamment défini et avaient invalidé en mai dernier l’article 22-23 du Code pénal. L’abrogation du délit de harcèlement sexuel avait entraîné l’extinction immédiate des procédures judiciaires en cours. Dès le lendemain de sa formation, le gouvernement issu de la nouvelle majorité de gauche avait décidé de déposer un nouveau projet de loi afin de combler ce vide juridique.
Les sénateurs puis les députés ont adopté mardi le texte mis au point jeudi dernier par une commission mixte paritaire Assemblée-Sénat. Il est donc définitivement adopté par le Parlement. Le texte définit deux types de harcèlement :
- Le fait « d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».
- Et « le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers ».
Ces délits sont punis d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende, portés à trois ans de prison et 45 000 euros en cas de circonstances aggravantes (personne ayant autorité, personne vulnérable, mineur de 15 ans). Le texte prévoit également d’étendre la protection contre le harcèlement sexuel aux personnes en période de formation ou de stage et aux candidats à un recrutement.
« PAR-DELÀ LES DIFFÉRENCES DE SENSIBILITÉ POLITIQUE »
« Les victimes peuvent de nouveau recourir à la justice. Les voilà désormais armées, et mieux armées, car l’incrimination est mieux définie et couvre un plan plus large et les sanctions sont mieux proportionnées à la gravité des faits, a déclaré la ministre de la justice, Christine Taubira. La circulaire d’application sera publiée le jour même de la promulgation de la loi. »
« Le contrat est rempli et la promesse tenue » s’est félicité le président PS de la commission des lois, Jean-Pierre Sueur. Esther Benbassa (écologistes) a salué une « authentique collaboration parlementaire, par-delà les différences de sensibilité politique, dans le souci exclusif de garantir aux victimes la possibilité de faire entendre leur souffrance ».
« C’est la société tout entière qui a un devoir d’éducation à l’égalité sexuelle », a averti la centriste Muguette Dini. « Quel qu’eût été le résultat des élections, nous avions tous le devoir de réagir rapidement », a dit Jean-Jacques Hyest (UMP).