Toulouse, 26 juil 2017 (AFP) – – « Mur de la honte » pour certains, seul moyen d’alerter les autorités pour les autres: le mur qui bloquait l’accès à un hôtel destiné à accueillir des demandeurs d’asile, près de Tarbes, a été détruit mercredi par les riverains qui l’avaient érigé deux jours plus tôt.
« Ce (mercredi) matin, on l’a fait tomber. On avait fait des propositions qui ont été acceptées par l’Adoma (ex-Sonacotra, qui va gérer le centre d’accueil, NDLR). On est satisfaits », a déclaré à l’AFP le responsable du collectif d’opposants Laurent Teixeira.
« Nos propositions ont été validées par l’Adoma et sont relatives à la scolarisation des enfants dès la rentrée et à des discussions régulières avec les différents acteurs. L’Adoma mettra les moyens nécessaires, notamment en personnel », pour un bon fonctionnement du centre d’accueil, a-t-il ajouté.
« L’Adoma a proposé de faire venir fin août 5 à 6 familles, soit 25 à 30 personnes, afin de préparer au mieux la venue des autres familles, de ne pas précipiter les choses et de s’en occuper au mieux, c’est important », a-t-il souligné.
Un bilan sera fait fin octobre afin d’adapter le rythme des arrivées ultérieures de migrants. L’hôtel a une capacité d’accueil de 85 personnes.
Ce mur, de près de 2 mètres de haut et 18 m de long, « était un symbole très choquant », a admis le responsable du collectif d’opposants, « mais cela a permis que le centre se fasse dans les meilleures conditions. On a réussi à les alerter. On n’est pas des +anti-migrants+ », a-t-il insisté.
Si les demandeurs d’asiles « sont heureux » dans le centre, « ils seront heureux de vivre avec la communauté qui les entoure », a souligné M. Teixeira.
Situé à Séméac, commune de 5.000 habitants de la banlieue de Tarbes, l’hôtel Formule 1 dont l’accès avait été bloqué fait partie des 62 établissements premier prix du groupe AccorHotels rachetés par la SNI (filiale de la Caisse des Dépôts) pour devenir des structures d’hébergement et d’accueil, gérées par l’Adoma.
– ‘Peurs et fantasmes’ –
Ce nouveau dispositif d’hébergement de migrants dans des hôtels à bas coûts, à l’initiative du ministère de l’Intérieur, a commencé à faire des vagues dans certaines communes. Mais c’est la première fois qu’une action aussi symbolique était entreprise par des riverains.
La CGT Hautes-Pyrénées s’est félicitée de sa destruction, mais a maintenu le rassemblement prévu mercredi à 17H30 devant l’hôtel car « ce dont il est question, et sans passer l’éponge sur cet acte infâme (…), c’est bien de faire en sorte que les familles de réfugiés soient désormais accueillies dans les meilleures conditions possibles ».
Depuis plusieurs mois, ce projet « suscite des peurs et des fantasmes » et « les discours alarmistes et parfois xénophobes ont pris le pas sur le dialogue et la réflexion », selon la CGT.
Ce mur « nous renvoie aux pires heures de notre histoire », avait réagi dès lundi, la députée européenne du Sud-Ouest, Marie-Pierre Vieu (PCF), qui, mercredi, s’est réjouie du déblocage de la situation: « Mur de la honte détruit ce matin à Séméac. Reste à abattre celui des préjugés. Solidarité aux migrants! »
La présidente de la région Occitanie Carole Delga (PS) avait réagi mardi dans un tweet: « Le mur anti-migrants ne correspond pas aux valeurs de l’Occitanie. Concertation des habitants et soutien de l’État sont nécessaires. »
La sénatrice EELV du Val-de-Marne Esther Benbassa avait également fait part de sa consternation sur Twitter: « Détestable symbole. Érigé pour empêcher la venue des migrants, ce mur en rappelle bien d’autres, hélas. » Seul le député des Pyrénées-Orientales et vice-président du FN Louis Aliot avait approuvé sa construction: « La résistance s’organise. »
Une réunion est prévue en préfecture, vendredi, à Tarbes, pour « commencer à travailler ensemble pour préparer au mieux » l’arrivée et le séjour des migrants à Séméac, a indiqué la préfecture.