Le blocage du site universitaire parisien de Tolbiac, lieu emblématique de la mobilisation contre la réforme de l’accès à la fac, a été levé vendredi à l’issue d’une vaste opération de police lancée au petit matin.

Au moins une centaine de CRS ont pénétré à 5h du matin sur le site, une tour de 22 étages occupée depuis le 26 mars, essuyant notamment des jets de bouteilles de verre et autres projectiles dans une ambiance très tendue.

Quelques minutes avant le début de l’intervention, les occupants des lieux avaient sonné l’alarme, semant la confusion. Certains se sont retranchés à l’intérieur tandis que d’autres tentaient de s’enfuir en escaladant la grille tout en lançant des projectiles sur les forces de l’ordre. La rue longeant le site, dans le XIIIe arrondissement, a été ensuite bouclée par la police. La situation était plus calme à 5h30.

Une interpellation

L’opération a pris fin vers 6h, a annoncé la préfecture de police de Paris, indiquant qu’une centaine de personnes présentes sur place avaient quitté les lieux dans le calme. Un individu a toutefois été interpellé pour outrage et rébellion.

L’opération s’est déroulée «dans le calme, aucun incident», a résumé la préfecture de police. Dans un communiqué, elle a par ailleurs relevé «des dégradations nombreuses» sur le site qui sont en cours de constatation «aux fins d’exploitation dans un cadre judiciaire».

«Les forces de l’ordre ont mis fin à l’occupation du site Tolbiac, sous l’autorité du Préfet de Police. Partout l’État de droit sera rétabli»s’est félicité le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb sur Twitter. Mercredi, devant l’Assemblée nationale, il avait promis que l’ordre serait rétabli «partout» et «en particulier dans les facultés».

«Capharnaüm»

L’intervention des forces de l’ordre avait été réclamée dès le 9 avril par Georges Haddad, président de l’université Paris-1 dont dépend Tolbiac, inquiet de la situation après la découverte de cocktails molotov sur le site et des dégradations sur place.

«J’ai du mal à le décrire (le site) tellement je suis consterné par l’état du centre, un vrai capharnaüm. La violence, la drogue, le sexe même. On me l’a dit, et je crois que c’est vrai, il se passe des choses qui sont indignes», avait récemment déclaré Georges Haddad sur Cnews.

Le président de l’université a évalué les dégâts, ce matin lors d’une conférence de presse, à «plusieurs centaines de milliers d’euros alors que 800 000 euros ont été investis dans les locaux ses deux dernières années. Tout est à refaire». La faculté restera fermée «jusqu’à nouvel ordre mais les examens se passeront», a-t-il affirmé.

La préfecture de police n’avait toutefois pas immédiatement donné suite à sa demande, invoquant une «appréciation technique». Dimanche soir, lors de son interview télévisée sur BFMTV et Mediapart, Macron avait mis en avant la «particularité topographique» du site de Tolbiac pour justifier la prudence de la préfecture.

«C’est une tour et l’appréciation de ceux qui ont à faire respecter l’ordre, c’est que c’est presque plus dangereux (d’intervenir) que de ne pas intervenir», avait justifié le chef de l’Etat.

Le syndicat UNI, classé à droite, avait, lui, déposé plusieurs recours en justice pour contraindre les forces de l’ordre à intervenir à Tolbiac. Jeudi, le tribunal administratif avait rejeté sa requête en jugeant qu’il appartenait au préfet de police de décider s’il y avait lieu «de faire intervenir les forces de l’ordre, et de définir le moment et les modalités de cette intervention».

Olivier Vial, président du syndicat, s’est félicité sur Twitter «que les forces de l’ordre aient enfin procédé à l’évacuation de Tolbiac» et demande que des «plaintes pénales soient déposées contre ceux qui ont saccagé cette université». Alexis Corbière, député de la France Insoumise, a lui dénoncé sur BFM TV «une mise en scène médiatique». La sénatrice Europe Ecologie Les Verts, Esther Benbassa, parle d’une «politique de la matraque».

Depuis plusieurs semaines, quatre universités sont totalement bloquées et une dizaine de sites (sur 400) perturbés pour protester contre la loi Orientation et réussite des étudiants (ORE), accusée par ses détracteurs d’instaurer un système de «sélection» déguisée.

LIBERATION avec AFP