L’allongement du délai de prescription d’un an adopté par le parlement (LexTimes, 8 février 2013)

Le Sénat a adopté hier à l’unanimité une proposition de loi étendant à la discrimination en raison du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap la prescription déroga- toire d’un an, au lieu de trois mois, alors qu’une décision du conseil constitutionnel est attendue sur le sujet dans les prochaines semaines.

Une nouvelle lecture sera nécessaire pour que son adoption soit définitive, un amendement de coordination incluant Wallis et Futuma, la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie ayant été introduit en commission, a indiqué la rapporteur du texte, Esther Benbassa (Ecologiste).

Le texte avait été déposé à l’Assemblée nationale par Catherine Quéré et Jean-Marc Ayrault en octobre 2011, qui l’avait adopté à l’unanimité également un mois plus tard. Le délai de prescription des provocations à la discrimination d’une part, et des diffamations et injures lorsqu’elles ont été prononcées en raison de l’origine ou de la religion d’autre part, avait été porté à un an par la loi Perben II de 2004. Toutefois, ce délai était resté de trois mois lorsque ces faits étaient commis en raison du sexe, de l’identité ou de l’orientation sexuelle ou du handicap.

« L’unification des délais de prescription va permettre de mettre fin à une inégalité de droit entre les victimes, qui n’est pas justifiable », a souligné la rapporteure du texte, Esther Benbassa (Ecologiste), relevant que l’étude de ce texte intervient « dans un contexte particulier, celui du débat entourant le projet de loi relatif à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe ». « Débat qui a frayé la voie, ces dernières semaines, à un climat souvent ouvertement homophobe et à la multiplication de propos intolérables », a-t-elle ajouté.

« N’imaginons cependant pas un instant […] qu’en harmonisant nos délais de prescription, nous risquions de compromettre la liberté de notre presse […] les infractions visées ne concernent en réalité que marginalement cette dernière », a-t-elle ajouté, précisant qu’internet « offre à tout particulier la possibilité de donner une publicité à des diffamations, à des provocations ou à des injures, en bénéficiant des garanties de la loi de 1881 [sur la liberté de la presse, ndlr], sans que pour autant celui-ci soit soumis à la déontologie des journalistes ».

Les intervenants ont été unanimes sur la nécessité de mener une réflexion sur internet. « Il faut des règles pour tous », a fait valoir le président de la commission des lois Jean-Pierre Sueur (PS). « L’Europe est un espace approprié pour édicter des règles », a-t-il ajouté. « Si internet avait existé pendant la dernière guerre, la Gestapo aurait eu moins de travail », a jugé de son côté Pierre Charon (UMP) tandis que Nathalie Goulet (UDI-UC) a estimé que « le droit de la presse n'[était] pas adapté aux nouveaux médias ».

Des amendements déposés par les écologistes Kalliopi Ango Ela et Hélène Lipietz visant à substituer dans le texte de la loi l’expression d’« identité de genre » » à celle d’« identité sexuelle » ont été retirés. Dans un communiqué, le Défenseur des droits, Dominique Baudis, a salué le vote du Sénat. « Il s’agit d’une avancée réelle en matière de défense des droits et des libertés et d’une mesure fondée sur l’équité en matière de lutte contre les discriminations et qui répare un déséquilibre manifeste », a-t-il écrit.

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