« La notion de quotas pour les demandeurs d’asile, ça n’a pas de sens », selon Bernard Cazeneuve (Public Sénat, 18 mai 2015)

[…] « Neuf mois : « on est loi de la procédure expéditive ! »

Ensuite, les sénateurs ont rapidement buté sur l’article 7 qui inscrit dans le texte du projet de loi un délai de procédure de trois mois maximum au sein de l’OFPRA chargé d’instruire les dossiers de demande d’asile. Un durcissement du texte contesté par le gouvernement qui craint que cette nouvelle obligation n’induise l’effet inverse que celui souhaité en ajoutant « des délais aux délais ». En imposant des « délais trop contraints », « la Cour nationale du droit d’asile pourrait être saisi » et renvoyer le dossier « pour un examen plus approfondi ». « Aujourd’hui, le délai réel [de l’OFPRA] c’est 24 mois alors que dans la plupart des pays de l’Union Européenne il est de 12 mois » a souligné le ministre de l’Intérieur. En imposant strictement trois mois de délais, « on est plus ambitieux que la directive européenne », a ironisé Bernard Cazeneuve. « Votre argumentation ne m’a pas convaincue » a rétorqué Philippe Bas, le président de la commission des lois, refusant de revenir sur cette disposition adoptée en commission.

Trêve de détails, sur la question de la réduction des délais, les positions entre la majorité et le groupe socialiste sont somme toute plutôt semblables. « Le plus préjudiciable, c’est la lenteur des délais » a reconnu Catherine Tasca. « Si on recule sur ce terrain, c’est tout le sens de la loi qui est compromis » a fait valoir la sénatrice socialiste. Seuls le groupe écologiste et le groupe communiste se sont fermement opposés à ce constat, défendant un certain nombre d’amendements identiques, à commencer par la suppression pure et simple de l’article 7. Parmi les dispositions les plus choquantes selon eux, l’introduction d’une « procédure accélérée » qui permette d’écarter rapidement les demandes qui seraient « infondées » et le recours à un juge unique. « Nous refusons que [cela] ne devienne la règle », a fait savoir Esther Benbassa au nom du groupe écologiste. La sénatrice du Val-de-Marne a témoigné de sa volonté de « rassurer le monde associatif qui s’occupe des demandeurs d’asile qui craint que cette procédure accélérée n’entraîne de traitement expéditif ».

Pour le ministre de l’Intérieur, c’est simple, « pour accélérer les délais, nous avons besoin d’une procédure accélérée ». Avec un délai imposé de « 9 mois » maximum, « on est loin de la procédure expéditive ! » s’est défendu Roger Karoutchi. Toutefois, le sénateur UMP admet volontiers que la frontière avec l’immigration économique est parfois ténue et que la « liste de pays d’origine sûr » qui préside à l’octroi de l’asile est loin de reposer sur « une définition claire ». « Un jour il faudra qu’on remette à plat cette liste de pays d’origine sûr » a-t-il défendu. Qui relève du droit d’asile et qui n’en relève pas ? « Ce non dit constant est insupportable » a-t-il adressé au ministre de l’Intérieur, ajoutant « ça n’a pas de sens ». Un flou entretenu que n’a pas renié Bernard Cazeneuve, sans y apporter toutefois de réponse.

C’est toute l’ambiguité qui plane sur le débat en cours, malgré de nombreux avertissements des sénateurs. Celui-ci se poursuit encore demain et reprendra peut-être en début de semaine prochaine avant le vote du texte le 26 mai prochain. »

 

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