Le texte vise principalement à accélérer les jugements, via une procédure en deux temps, entrecoupée d’une période de « mise à l’épreuve éducative ».
Le Sénat à majorité de droite a adopté à main levée, mercredi soir 27 janvier, en première lecture, après l’Assemblée nationale, la réforme de la justice pénale des mineurs, jugée trop « répressive » par la gauche. Le texte vise principalement à accélérer les jugements, via une procédure en deux temps, entrecoupée d’une période de « mise à l’épreuve éducative ».
Députés et sénateurs vont tenter de s’accorder sur un texte commun en commission mixte paritaire, ce qui paraît atteignable. « Les débats ont montré une convergence sur l’essentiel », a ainsi relevé le sénateur du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI) à majorité En marche, Thani Mohamed Soilihi.
Le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, a « pris acte » de la volonté des sénateurs de reporter l’entrée en vigueur de la réforme du 31 mars au 30 septembre. Selon la rapporteuse Les Républicains (LR), Agnès Canayer, il s’agit de lui « donner toutes les chances d’atteindre son objectif de réduction de la délinquance ».Article réservé à nos abonnés Lire aussi La réforme de la justice des mineurs reportée à septembre
Une procédure en deux temps
Le projet de loi adopté à main levée est la ratification d’une ordonnance. Une méthode unanimement critiquée sur les bancs du Sénat. Le code de la justice pénale des mineurs qu’elle organise a vocation à remplacer l’ordonnance de 1945 consacrée à la délinquance juvénile. La sénatrice centriste Dominique Vérien en attend « une amélioration pour l’enfant jugé mais aussi pour la victime ».
Il met en place une procédure en deux temps, avec l’objectif de diminuer le recours à la détention provisoire, qui concerne aujourd’hui 80 % des mineurs emprisonnés.
Une première audience devra statuer sur la culpabilité dans des délais de trois mois (contre 18 mois actuellement en moyenne). Une seconde audience devra se tenir dans un délai compris entre six et neuf mois, pour le prononcé de la sanction (peine ou mesure éducative).
Dans l’intervalle, le mineur sera soumis à une période de « mise à l’épreuve éducative », qui peut comporter des mesures éducatives et des mesures de sûreté. Une « audience unique » restera possible pour des mineurs déjà connus de la justice.
Décision confiée à un juge des enfants
Contre l’avis du gouvernement, les sénateurs ont confié à un juge des enfants et non au juge des libertés et de la détention, la décision de placer un mineur en détention provisoire. De même ils ont confié au juge des enfants les contraventions les moins graves, pour lesquelles le tribunal de police était compétent. Le code prévoit aussi une présomption d’irresponsabilité avant 13 ans.
Concernant le « discernement », la Chambre haute s’est rangée à la définition du gouvernement selon laquelle le mineur « a compris et voulu son acte » et « est apte à comprendre le sens de la procédure pénale ».
La gauche a voté contre le texte, la présidente du groupe CRCE à majorité communiste, Eliane Assassi, dénonçant « une dérive répressive », tandis que l’écologiste Esther Benbassa jugeait « le rapprochement de la justice des mineurs de celle des majeurs problématique ». « Un mineur en conflit avec la loi doit être considéré avant tout comme un enfant à protéger », a déclaré Laurence Harribey (PS).
Un amendement de la sénatrice LR Valérie Boyer a créé en soirée un moment de crispation. Il visait à créer « un contrat d’engagements » pour « responsabiliser » les familles, assorti de pénalités financières. Il n’a finalement pas été adopté.
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