Les sénateurs ont voté contre les crédits consacrés à la mission « Immigration, Asile et intégration ». Pourtant en hausse, ce budget souffre d’un manque de cohérence et s’appuie sur une baisse incertaine des demandes d’asile d’après les sénateurs.
Malgré le durcissement du discours d’Emmanuel Macron en matière d’immigration, le budget de son gouvernement n’a pas convaincu un Sénat majoritairement à droite. Les sénateurs ont rejeté, jeudi, les crédits consacrés à la mission « Immigration, Asile et intégration ». Si le budget est en « hausse globale de 9,6% à périmètre constant » par rapport à l’année précédente, il n’est pas à la hauteur selon les sénateurs qui reprochent au gouvernement de « parier sur le fait qu’il n’y aura pas de demandes d’asile supplémentaire en 2020 ».
Exemple concret de ce problème d’estimation, pour le sénateur LR François-Noël Buffet, le financement de l’aide pour l’allocation pour les demandeurs d’asile (ADA). « Nous nous interrogeons sur l’ADA, on ne comprend pas que le budget prévu pour 2020 soit de 444 millions d’euros alors même que la consommation pour l’année 2019 est à plus de 509 millions d’euros », soulève le sénateur. Par ailleurs, la droite sénatoriale pointe la baisse des crédits alloués à la lutte contre l’immigration irrégulière.
« La norme de l’accueil aujourd’hui pour les demandeurs d’accueil c’est la rue »
À la gauche de l’hémicycle, la sénatrice CRCE Esther Benbassa étrille, elle, « un budget déséquilibré tant il fait la part belle au financement de la lutte contre l’immigration irrégulière au détriment de l’intégration et de l’accès à la nationalité française ». La sénatrice rappelle qu’en 2018, 2260 migrants sont morts noyés en Méditerranée. « L’horreur que doit susciter ce chiffre devrait nous inciter à adopter des orientations financières diamétralement opposées », plaide-t-elle. Comme le reste de l’hémicycle, la sénatrice a aussi déploré que les moyens ne soient déployés pour assurer un hébergement digne. « La norme de l’accueil aujourd’hui pour les demandeurs d’accueil c’est la rue (…) et rien dans ce budget ne fait évoluer les choses en matière d’hébergement », a dénoncé de concert le sénateur socialiste, Jean-Yves Leconte.
Passe d’armes entre le ministre et le rapporteur spécial
En marge du débat, le rapporteur spécial de la commission des finances, Sébastien Meurant (LR) s’est fait remarquer par un discours provocateur. « Jamais on n’a envoyé un tel message de laxisme en relaxant la plupart des passeurs tout en condamnant à de la prison ferme les jeunes militants de Génération identitaire », a-t-il par exemple déclaré en évoquant aussi le pacte (non contraignant) de Marrakech. Sous les applaudissements d’une partie de l’hémicycle, Christophe Castaner a ironisé sur ses convictions politiques. « J’ai cru perdre la mémoire et j’ai été recherché sur votre fiche Wikipédia votre positionnement politique. Et je trouve qu’on ne peut pas tout mélanger sur un sujet aussi sensible que celui-là », a-t-il conclu.