Qualifiée d’aussi « sécuritaire » que celle de Sarkozy, la politique d’immigration exposée par Manuel Valls n’est pas au goût de tout le monde. Si le gouvernement défend cette ligne très ferme, les Verts et le PCF sont déçus par la faible portée des mesures envisagées.
Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls a exposé mercredi dans Le Monde ses propositions concernant l’immigration. Jugée très ferme par bon nombre d’associations, la politique migratoire de Manuel Valls ne prévoit pas plus de 30.000 régularisations par an.
Si cette ligne très stricte est assumée par le PS, les autres foramtions de gauche la jugent vague, décevante et très proche de celle de Sarkozy.
« On ne peut accepter que la gauche mette ses pas dans ceux de Claude Guéant », s’exclame la direction du Parti communiste dans un communiqué. Le PCF est fermement opposé à la politique derégularisation des sans-papiers au cas par cas. proposée par Manuel Valls. « Il faut au contraire définir des critères qui permettent à tous d’être à égalité », affirme-t-on au PCF.
Malgré quelques avancées, notamment sur la fin à la rétention des familles ou sur la création d’un titre de séjour de trois ans, les communistes dénoncent des mesures « simplistes » voire « inquiétantes » en ce qui concerne la reconduite des clandestins à la frontière.
« Pas de pas de géant »
Même constat de déception du côté d’Europe Ecologie-Les Verts. La sénatrice écologiste du Val-de-Marne, Esther Benbassa, rapporteure de la proposition de la loi sur le droit de vote des étrangers, déplore une politique d’immigration très sécuritaire.
« Il y a quelques avancées sur le permis de séjour de 3 ans ou sur la naturalisation, concède-t-elle, mais on ne peut pas dire que ce soit des pas de géant ».
La sénatrice EELV regrette l’absence de précision de Manuel Valls sur ses propositions. « J’ai lu les déclarations de Manuel Valls et il ne répond pas à la question des reconduites à la frontière. De même pour l’immigration clandestine, il ne propose pas grand-chose. Même chose pour la loi Besson, il reste très vague sur tout. C’est un peu de la langue de bois », estime-t-elle.
Esther Banbassa espérait davantage d’une politique de gauche même si elle savait que Manuel Valls « n’est pas un homme très à gauche ».
« On s’attendait à une politique plus active, plus déterminée pour faire bouger les choses. J’aurais aimé qu’on essaye de décongestionner le flux des sans-papiers en augmentant le nombre de régularisés. » La sénatrice ne remet pas en cause « le contexte économique délicat » mais souhaite « des actes plus sensibles ».
« Une image de père fouettard »
La voix du Front de Gauche, portée par Jean-Luc Mélenchon, est bien plus agressive et catégorique.
Invité de Jean-Jacques Bourdin ce jeudi matin sur RMC/BFMTV, l’ancien candidat à la présidentielle accuse Manuel Valls de « valider une thèse absurde, anti-économique, ridicule du Front national« : celle « d’après lequel il y aurait un rapport entre l’immigration et les difficultés sociales ».
Le coprésident de Parti de gauche a souligné qu' »être de gauche, c’est être partisan de l’humain d’abord ». Manuel Valls « essaye de donner une image de père fouettard », a poursuivi l’eurodéputé.
« Il est en train d’épouser tous les poncifs autoritaires qu’on a connus » et « qui ne veulent rien dire », a-t-il conclu, incitant le ministre de l’Intérieur à « arrêter les méthodes de Sarkozy ».
« Une politique dangereuse »
La politique d’immigration du ministre de l’Intérieur a décidement bien du mal à plaire. Jugée trop à droite par gauche, elle est pourtant loin de satisfaire l’UMP.
Le député UMP Eric Ciotti a dénoncé « une politique dangereuse et risquée », qui va « augmenter massivement les flux migratoires ».
Xavier Bertrand évoque « un rideau de fumée car la gauche voit bien que nous sommes dans un pays qui veut la fermeté, que nous avons toujours incarnée ». Le député de l’Aisne renvoie le PS à ses contradictions en soulignant que « c’est surtout à la majorité de gauche qu’il (ndlr: Manuel Valls) va devoir rendre des comptes ».
Malgré toutes ces critiques, Manuel Valls ne se démonte pas et persiste à se justifier. « Être de gauche, ce n’est pas régulariser tout le monde et se retrouver dans une impasse », affirme-t-il. Ce débat ne fait que commencer.