Harcèlement sexuel: le projet de loi adopté à l’unanimité par les sénateurs
LeHuffPost/AFP | Publication: 12/07/2012 20:28 Mis à jour: 12/07/2012 21:45
Après de longues heures de débat, le Sénat a finalement adopté jeudi 12 juillet à l’unanimité le nouveau projet de loi sur le harcèlement sexuel . Le nouveau texte définit plus précisément ce délit et alourdit les sanctions, deux mois après l’abrogation du texte précédent par le Conseil constitutionnel. Le gouvernement s’était engagé à aller vite, la décision des Sages, ayant entraîné une extinction immédiate des procédures judiciaires en cours, y compris les condamnations non définitives.
La transphobie inscrite dans le code pénal
Le gouvernement a introduit par amendement la notion de « particulière vulnérabilité ou dépendance de la victime résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale, apparente ou connue de l’auteur » comme circonstance aggravante, comme le demandait la sénatrice Chantal Jouanno. La loi punit également le fait de discriminer une personne ayant subi ou refusé de subir le harcèlement. Les sénateurs ont introduit la transphobie dans le code pénal parmi les discriminations prohibées.
Craintes
Le texte cependant est estimé imparfait par certaines associations de lutte contre le harcèlement sexuel, notamment l’AVFT (Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail), qui craignent une « déqualification », c’est-à-dire que le délit de chantage sexuel conduise à moins punir des tentatives d’agressions sexuelle ou de viol. La sénatrice Chantal Jouanno a aussi dénoncé, dans nos colonnes comme au Sénat, les risques que contiennent le texte : « Est assimilable à du harcèlement sexuel, un acte unique commis sous la contrainte, l’ordre ou la menace. Mais cela ne devrait-il pas être qualifié d’agression sexuelle? Combien d’agressions vont ainsi être requalifiées en harcèlement? », souligne-t-elle.
Une discussion a eu lieu à ce sujet, au cours de laquelle le rapporteur Alain Anziani (PS) a souligné que pour les cas de viols et d’agressions sexuelles, « il faut qu’il y ait un acte matériel sur la personne ». « Quand nous parlons de harcèlement sexuel nous sommes dans un autre univers, il n’y aura pas d’attouchements, de contacts physique », a-t-il argué. L’AVFT a eu gain de cause sur un autre sujet d’inquiétude : le texte rétablit la cohérence entre le code pénal et le code du travail.
« Du vrai travail parlementaire »
Le Sénat s’était particulièrement impliqué, tous partis confondus, avec pas moins de sept propositions de loi et un groupe de travail qui a auditionné toutes les parties. Les orateurs de l’UMP Chantal Jouanno et Jean-Jacques Hyest ont vivement loué le travail des rapporteurs PS. « Nous nous félicitons du travail qui a permis d’avoir un texte équilibré, efficace avec une grande sécurité juridique », a dit Jean-Jacques Hyest.
« Nous avons donné une leçon de démocratie », s’est réjouie Esther Benbassa (Ecologiste) assurant que « cela a créé des liens entre nous ». La sénatrice écologiste a lu au cours du débat une lettre d’une jeune universitaire décrivant sa souffrance et « le calvaire de son parcours judiciaire ». »C’est du vrai travail parlementaire, chacun a apporté sa pierre à l’édifice », s’est félicité le président PS de la Commission des Lois, Jean-Pierre Sueur.
Réactions
La ministre de la Justice, Christiane Taubira, s’est félicitée « de l’adoption à l’unanimité du projet de loi sur le harcèlement sexuel, seulement deux mois après l’abrogation de ce délit par le Conseil constitutionnel ». « Cette loi se situe à la hauteur des ambitions d’une République exemplaire, qui place la dignité de la personne au cœur de l’action politique », a-t-elle ajouté.
La ministre Najat Vallaud-Belkacem (Droits des femmes) a annoncé la création d’un Observatoire national sur ces violences à l’automne dans le cadre d’un futur projet de loi sur les violences envers les femmes.
La discrimination envers les trans désormais réprimée, décide le Sénat
LeHuffPost/AFP | Publication: 12/07/2012 19:32 Mis à jour: 12/07/2012 20:02
Un amendement consensuel, rédigé sur la base d’un sous-amendement du gouvernement et de plusieurs amendements des écologistes, de l’UMP, du PS et du groupe CRC (communistes), a été adopté en ce sens. Il ajoute le critère de « l’identité sexuelle » à l’article du code pénal qui réprime les discriminations, afin de reconnaître la transphobie parmi ces discriminations interdites.
« Omerta législative »
L’homophobie est déjà, depuis 2001, introduite dans le code pénal par le biais du critère de « l’orientation sexuelle », parmi les discriminations prohibées.
Tous les intervenants ont longuement insisté, notamment Esther Benbassa (groupe écologiste), Chantal Jouanno (UMP), Isabelle Pasquet (CRC) ou Michelle Meunier (PS), sur le sort des transsexuels ou transgenres, « particulièrement exposées au harcèlement sexuel ». « Nous voulons briser l’omerta législative sur le sujet », a lancé Isabelle Pasquet. « Près de la moitié des personnes transsexuelles ou transgenres sont victimes de harcèlement durant leur transition », a souligné Esther Benbassa.
Chantal Jouanno (UMP) a évoqué « la détresse dans laquelle se trouvent les personnes transsexuelles ». Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, a soutenu l’amendement. Un collectif d’associations de personnes transsexuelles avait été auditionné par le groupe de travail mis en place par le Sénat après l’abrogation par le Conseil constitutionnel du délit de harcèlement sexuel.