Droit de vote des étrangers: le PS reprend la main
Par Marie Simon, publié le
Comme les députés socialistes, le leader du PS Harlem Désir veut aller de l’avant sur le droit de vote des étrangers. Mais sa lettre ouverte dans Libération s’adresse autant aux opposants à cette réforme qu’à son propre camp.
On ne l’arrête plus. Après avoir lancé une pétition en faveur du mariage et de l’adoption pour tous, Harlem Désir s’empare du droit de vote des étrangers non-communautaires aux élections locales. La lettre ouverte qu’il publie ce mercredi dans les colonnes de Libération est adressée aux parlementaires, tous partis confondus. Mais elle pourrait bien aussi avoir pour objectif de remobiliser la gauche en reprenant la main.
Assez discret depuis qu’il a pris la succession de Martine Aubry à Solférino, le premier secrétaire du PS décline ses arguments. « Accorder le droit de vote aux étrangers est une arme pour lutter contre le repli identitaire et la fragmentation de la société comme de la Nation », écrit-il par exemple.
A la conquête de la majorité des 3/5e au Congrès
Des arguments qui répondent, terme à terme, à ceux des opposants à cette réforme, alors que les députés socialistes sont impatients de « mener la bagarre », selon l’expression du porte-parole du groupe, Thierry Mandon. Il manquerait encore une trentaine de voix pour obtenir la majorité des 3/5e au Congrès, seuil nécessaire pour valider une réforme constitutionnelle de ce type. Il va falloir aller chercher ces voix. Sans quoi, François Hollande a prévenu, mi-novembre: pas de majorité assurée d’avance, pas de projet de loi.
Razzy Hammadi, député socialiste qui avait initié une tribune à ce sujet dès septembre dernier, se réjouit de la « volonté de prendre ce travail à bras le corps » qu’il retient de la lettre de Harlem Désir. Impatient, il rappelle que le « calendrier est serré, si nous voulons que la réforme soit en vigueur pour les élections municipales de 2014 ». Il veut que les députés socialistes « conduisent l’action militante sur le terrain, dans les bureaux et les circonscriptions, dès janvier ».
Des contacts ont-ils déjà été pris à l’Assemblée nationale, avec l’UMP ou l’UDI? Des discussions s’ouvriraient seulement, comme entre Bruno Le Roux, président du groupe PS, et son homologue de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde, mais « très brièvement et sans que cela soit l’objet central » de leur entretien, selon ce dernier. « On n’en est pas encore aux débats entre groupes », glisse Thierry Mandon.
Rassembler et rassurer une gauche démobilisée?
Et si Harlem Désir tentait surtout de remobiliser son propre camp? Après le difficile dossier Florange, l’exécutif plonge dans les enquêtes d’opinion, et les candidats socialistes sont à la traîne dans les trois élections législatives partielles dont le second tour se tient ce dimanche. Serait-il tenté de surfer sur les marqueurs sociétaux pour resserrer les rangs et remobiliser les électeurs de gauche?
La tribune de Harlem Désir « n’a rien à voir avec les partielles. Nous avons de toutes façons peu de chances dans des circonscriptions dures pour la gauche, face à des notables locaux et de gros cumulards », balaie Thierry Mandon. Mais, concède-t-il, « nous sommes très attendus par notre électorat sur ce thème qui est susceptible de rassembler à gauche, oui. »
Rassembler… et rassurer? « Pas besoin. Tous les engagements sont tenus au fur et à mesure », ajoute-t-il. En attendant, les appels à accélérer le changement se multiplient, comme les pétitions initiées par la sénatrice EELV Esther Benbassa ou par le député socialiste Jean-Christophe Cambadélis. Lui qui visait lui aussi la succession de Martine Aubry appelle même Harlem Désir à « rectifier le tir » et à reprendre la main, dans Le Figaro. Appel entendu.