Confiance dans l’institution judiciaire : ma prise de parole sur l’enregistrement des audiences

« Si j’en comprends l’ambition pédagogique, je me demande en revanche jusqu’où peut aller cette captation. À quelles conditions cette pratique sera-t-elle réellement compatible avec le droit à l’oubli ? »

Les PJL Confiance dans l’institution judiciaire et PJLO Confiance dans l’institution judiciaire étaient en discussion en séance publique au Sénat le 28 septembre 2021.

Lien vers la vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=EJdWnHz-qMY

Intégralité du texte prononcé :

Monsieur le Président,  

Mes chers collègues,  

Hier s’est tenu au sein de la Commission des Lois, une Agora de la Justice. Je salue cette initiative du Sénat. L’Institution doit rester au cœur du débat, surtout quand celui-ci porte sur la confiance dans la justice de nos concitoyens Français. En effet, 53% des personnes sondées déclarent ne pas faire confiance en l’institution judiciaire. Ce chiffre est effroyable ! L’État de droit est fébrile et si nous, parlementaires, acteurs et législateurs, nous n’inversons pas la tendance, que restera-t-il de notre démocratie?  

Nous devons nous poser les bonnes questions. Pourquoi une telle défiance envers notre système juridictionnel ?  

D’abord, permettez-moi d’émettre une réserve à l’article premier du projet de loi. Si je comprends l’ambition pédagogique de faire connaître aux Français le fonctionnement de la justice, je me demande en revanche jusqu’où peut aller cette captation ? Il ne faudrait pas transformer les prétoires en Justice spectacle !  

De plus, cet article est-il réellement compatible avec le RGPD et le droit à l’oubli ? Les parties avant de donner leur accord, doivent être éclairées scrupuleusement sur le déroulement et les motifs de l’enregistrement. Ainsi, je demande à ce qu’on précise davantage le motif d’intérêt général qui me semble bien trop vague. Concilier le respect des droits individuels des acteurs d’un procès et le droit à l’information du public a toujours été en débat. Il est donc nécessaire d’inviter le législateur à se montrer plus précis sur l’objectif poursuivi pour déterminer ce qui pourrait relever de l’intérêt public. Nous devons justifier précisément en quoi l’enregistrement sonore ou audiovisuel des audiences mériterait d’être autorisé car, à défaut, ce choix serait laissé au seul juge. De quelle façon pouvons-nous étoffer cet article premier ? En garantissant notamment le respect des droits des personnes concernées, avec, pourquoi pas, la création d’un juge de la mise en image. Il aura pour rôle de veiller à la protection des données personnes, au respect du droit à l’image et à la vie privée.  

Tout autant de questions qui méritent débat, ce projet de loi ne doit laisser place à aucune ambiguïté puisqu’il s’agit de renforcer la confiance des Français dans notre Justice. Nous devons être à la hauteur de cette mission.

SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI