Paris, le 11 février 2014
L’échange de cet après-midi, à l’Assemblée nationale, lors de la séance des questions au Gouvernement, entre M. Bernard Debré, député UMP de Paris, et Mme Marisol Touraine, Ministre (PS) des Affaires sociales et de la Santé, ne rehausse guère le débat politique.
Face à la proposition de loi autorisant l’usage contrôlé de cannabis déposée il y a quinze jours par Esther Benbassa au nom du groupe écologiste du Sénat, M. Debré et Mme Touraine n’ont donné à leur échange que l’apparence d’une confrontation.
Ils se sont en fait retrouvés pour nier le réel, et notamment l’échec patent de la politique prohibitionniste en vigueur, laquelle encourage les trafics mafieux et le développement d’une économie souterraine, tout en livrant les consommateurs – et spécialement les jeunes – à un usage massif (ainsi que l’attestent les chiffres) et non contrôlé (donc particulièrement dangereux) du cannabis.
Se hâtant de refermer le débat avant qu’il ne soit ouvert, ils se sont l’un et l’autre interdit de penser loyalement et sans œillères une situation effectivement grave tant sur le plan sanitaire que sécuritaire. Et ils se sont entendus sur le maintien d’un statu quo dont nous savons pourtant tous qu’il est dévastateur.
La seule attitude politiquement responsable, en ces matières comme en quelques autres, est de renoncer aux simples postures morales, d’avoir le courage de faire un diagnostic sincère, de poser sans tabou tous les termes du problème, et de se donner enfin les moyens de le résoudre.
M. Debré n’est pas près de le faire, et l’on ne saurait s’en étonner. Mme Touraine non plus, et l’on peut le regretter. Ce constat ne peut qu’encourager Esther Benbassa à poursuivre sans relâche et résolument – au côté des addictologues, de la société civile, des experts, des associations, de tous les acteurs de terrain – l’action qu’elle a engagée et dont le dépôt de sa proposition de loi n’est qu’une première étape.