Antiterrorisme : ce que contient le projet de loi qui remplacera l’état d’urgence (« L’Obs », 19 juillet 2017)

Assignation à résidence élargie à la commune, fermeture de lieu de culte, périmètres de protection de sites à risque : les grandes mesures votées par les sénateurs.

Le Sénat a adopté dans la nuit de mardi à mercredi le nouveau projet de loi antiterroriste voulu par le gouvernement pour remplacer, au 1er novembre, le régime exceptionnel de l’état d’urgence en pérennisant et en inscrivant dans le droit commun certaines de ses mesures.

L’ensemble de la droite sénatoriale LR et centriste, majoritaire, mais aussi les sénateurs LREM et ceux du RDSE, à majorité PRG, soit 229 élus, ont voté en première lecture pour ce texte qui sera débattu en octobre à l’Assemblée nationale. En revanche, 106 ont voté contre : les socialistes, les communistes et trois ex-membres du groupe écologiste désormais disparu, Aline Archimbaud Jean Desessard et Esther Benbassa.

Le Sénat a validé les modifications apportées au projet de loi par sa commission des lois en mettant en avant la défense des libertés publiques. Voici les grands points du projet de loi :

Les assignations à résidence (rebaptisées « mesures individuelles de surveillance ») seront ordonnées par le préfet, qui aura avisé auparavant le procureur. L’espace de l’assignation ne pourra être inférieur au territoire de la commune. Ces mesures viseront « toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics ».

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« Société du soupçon permanent »

Le texte avait été dénoncé par plusieurs organisations, dont Amnesty International France, la Ligue des Droits de l’Homme ou le syndicat de la magistrature (SM), mais aussi des personnalités comme le défenseur des droits Jacques Toubon, la juriste Mireille Delmas-Marty et le commissaire européen aux droits de l’Homme Nils Muiznieks.

Antiterrorisme : pourquoi intégrer l’état d’urgence dans le droit commun inquièteUne centaine de manifestants ont d’ailleurs défilé mardi devant le Sénat, à l’appel de plusieurs associations et syndicats, dont Droits devant, le DAL, le MRAP, ou l’Union syndicale solidaire, aux cris de : « État d’urgence, État policier ! Nous ne lâcherons rien de nos libertés ».

Le numéro un du PCF, le sénateur Pierre Laurent, avait annoncé qu’il allait « combattre le texte dans son ensemble ». Mais une question préalable de son groupe, dont l’adoption aurait entraîné le rejet de l’ensemble du texte en discussion, a été rejetée d’emblée.

Pour le ministre de l’Intérieur, la menace terroriste « est là, toujours prégnante ». « Nous voulons sortir de l’état d’urgence, mais nous ne pouvons le faire sans adapter notre dispositif de lutte contre le terrorisme », a dit Gérard Collomb. « Il nous reste encore à prendre des mesures qui nous semblent essentielles », a-t-il ajouté.

« La France ne peut se démunir contre le terrorisme« , a approuvé François-Noël Buffet (LR). « Il fallait donc ce texte. » « Vous arrivez à nous proposer une situation où on maintient l’état d’exception sans être dans l’état d’exception. Tout cela n’est pas crédible », a critiqué Jacques Bigot (PS).

« Avec ce projet de loi, la société qu’on nous propose de construire n’est même pas une start-up, mais une société du soupçon permanent, laissée entre les mains des pouvoirs administratifs, où le préfet et le ministre de l’Intérieur peuvent remplacer désormais les juges », a reproché Esther Benbassa.

 

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