Alors que les députés viennent d’adopter la nouvelle loi antiterroriste, au Sénat, plusieurs parlementaires s’inquiètent des conséquences pour les libertés publiques au point, pour certains, de souhaiter une prorogation de l’état d’urgence. Un régime d’exception, certes, mais temporaire et contrôler par le Parlement.
« L’état d’urgence donne des moyens très importants à l’État pour lutter contre le terrorisme. La loi qui est en cours de discussion inscrit dans la loi permanente, une version en quelque sorte dégradée de l’état d’urgence » s’inquiétait, lundi, le président LR de la commission de lois du Sénat, Philippe Bas avant de se demander si c’était « bien judicieux », « bien prudent » de mettre fin au régime d’exception « compte tenu de la gravité et de l’actualité de la menace terroriste ». L’état d’urgence arrive, en effet, à son terme, le premier novembre prochain. La loi « renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » est censée prendre la suite. Mardi matin, l’ancien Premier ministre, Manuel Valls a estimé que, même si « on aurait pu rester dans l’état d’urgence », le texte présenté par le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, correspondait « à ce qu’il fallait faire, c’est-à-dire mettre dans le droit commun la plupart des mesures qui sont dans l’état d’urgence et qui sont utiles ».
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Au groupe PS, Jacques Bigot reconnaît que si « les perquisitions administratives » et les « assignations à résidences » doivent continuer à faire l’objet d’un contrôle du Parlement. « Si ces mesures sont véritablement nécessaires, sans doute faut-il rester dans l’état d’urgence ou trouver une solution pour qu’au moins dans le droit commun, il y ait un contrôle soit du Parlement, soit du pouvoir judiciaire (…) Manifestement, et c’est sans doute la position de Philippe Bas, le Sénat devra être de nouveau le garant des libertés publiques ».
La mise en garde de Gérard Larcher
Interviewé dans le journal Le Monde, le président du Sénat, Gérard Larcher, rappelle également la responsabilité du Sénat en matière de libertés individuelles et collectives ». Il met également en garde contre « le risque sérieux d’inconstitutionnalité », « de l’obligation de fournir des données de communication » du texte de l’Assemblée nationale.
Esther Benbassa, sénatrice de Paris et rattachée au nouveau groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste considère pour sa part qu’aussi bien l’état d’urgence que « l’accumulation des lois » ne peut « pallier les insuffisances de l’administration ». Elle en veut pour preuve, la situation de terroriste de Marseille, abattu ce week-end, après avoir tué deux jeunes filles. Ahmed H., étranger en situation irrégulière, interpellé deux jours avant son crime pour un vol, aurait-il dû être placé en rétention en vue d’une éventuelle expulsion? Le ministre l’Intérieur Gérard Collomb a saisi lundi soir l’inspection générale de l’administration, afin de faire la lumière sur une éventuelle défaillance. Esther Benbassa s’inquiète également des conséquences des contrôles d’identité étendus dans le cadre des nouveaux périmètres de sécurité, et qui pourraient selon elle, « se transformer en un contrôle au faciès ».
Il est à noter, enfin, qu’en matière d’état d’urgence et de loi antiterroriste, Philippe Bas n’est pas le seul à faire évoluer sa position. Dans son livre Révolution, Emmanuel Macron écrivait il y a un an : « Nous avons tout l’appareil législatif permettant de répondre, dans la durée, à la situation qui est la nôtre ».
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