L’accord commercial de libre-échange entre l’UE et le Canada (Ceta) n’empêchera pas de garantir l’application du principe de précaution dans l’UE, a jugé le Conseil constitutionnel, même si ce principe n’est pas directement mentionné dans l’accord.
Saisi par une centaine de députés de gauche en février dernier, le Conseil constitutionnel a jugé, le 31 juillet, que l’accord commercial de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada (Ceta), ne nécessitait « pas de révision de la Constitution » française.
Le Conseil était interrogé pour la première fois sur un accord de commerce et d’investissement. Sa décision était très attendue par les requérants qui ont attaqué ce texte approuvé le 15 février dernier par le Parlement européen, estimant qu’il « menace les normes sociales et environnementales« . La saisine des parlementaires reposait sur quatre arguments, dont celui d’une méconnaissance du principe de précaution, à valeur constitutionnelle en France depuis 2005 (avec l’adoption de la Charte de l’environnement).
Le principe de précaution garanti
Le Conseil constitutionnel a statué sur le principe de précaution dont « il a réaffirmé la valeur constitutionnelle », même s’il reconnaît que ce principe n’est pas directement mentionné dans l’accord. Les Sages ont rappelé les engagements des parties (l’Union européenne et ses Etats membres ainsi que le Canada), contenus dans le chapitre 22 de l’accord « expressément consacré au commerce et au développement durable ». Les parties visent à « favoriser le développement durable par une coordination et une intégration accrues de leurs politiques et mesures respectives en matière de travail, d’environnement et de commerce, (…) améliorer l’application de leur droit respectif en matière de travail et d’environnement » et » favoriser la consultation et la participation du public dans la discussion des questions de développement durable ».De même,« l’absence de mention expresse du principe de précaution dans les stipulations de l’accord, qui relèvent d’une compétence partagée entre l’Union européenne et les Etats membres, n’emporte pas de méconnaissance de ce principe« , ont-ils ajouté. Ce principe est donc protégé par le droit de l’Union européenne.
Le Conseil a aussi confirmé que les parties sont autorisées à prendre des mesures « économiquement efficaces » visant à prévenir la dégradation de l’environnement, en cas de risque de dommages « graves ou irréversibles« . En outre,« l’instrument interprétatif commun de l’accord précise que les parties sont tenues d’assurer et d’encourager des niveaux élevés de protection de l’environnement, de s’efforcer d’améliorer continuellement leur législation et leurs politiques en la matière de même que les niveaux de protection sur lesquels elles reposent ». Les Sages ont par conséquent conclu que « l’ensemble de ces stipulations [de l’accord] sont propres à garantir le respect du principe de précaution issu de l’article 5 de la Charte de l’environnement » dans la Constitution française.
Stopper l’application provisoire du Ceta
Les députés contestaient également l’application provisoire de l’accord (dans une proportion de 90%), prévue à compter du 21 septembre, en attendant sa ratification par les parlements de tous les pays membres de l’UE.
Le Conseil constitutionnel a rappelé que l’accord n’est pas « irrévocable » et qu’il prévoit « la possibilité d’interrompre cette application provisoire en cas d’impossibilité pour une partie de le ratifier ».L’application provisoire de l’accord concerne donc des dispositions relevant de la compétence « exclusive de l’Union européenne » et « qui ne portent pas atteinte aux conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale », estiment les Sages.
Les réactions de parlementaires de gauche n’ont pas tardé. Parmi les députés requérants, Delphine Batho, députée Nouvelle gauche (Deux-Sèvres) « espéraitune autre décision » du Conseil. « Mais le combat continue. Je voterai contre la ratification du Ceta« , a-t-elle réaffirmé sur twitter. Les députés du Front de gauche ont également appelé à « donner la parole au peuple et organiser un référendum »,suite à cette décision. La sénatrice écologiste Esther Benbassa (Val-de-Marne) a aussi dénoncé « le risque de régression de nos standards sociaux et environnementaux » qui « ne serait donc pas constitutionnel ».
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