« Passe à ton député, c’est de la bonne… » (reportage de LaTéléLibre sur le colloque Cannabis du 10 octobre 2016 au Sénat, article + vidéo)

Depuis près de 50 ans, tout ce qui touche à ce que l’on appelle les produits stupéfiants est régi en France par la loi 70-1320 du 31 décembre 1970. Un demi-siècle après, avec donc suffisamment de recul pour en apprécier l’efficacité, on ne peut que constater sa totale inefficacité.

La France est bonnet d’âne de l’Europe en matière de prévalence cannabique (nombre de personnes rapportées à une base 100 ayant consommé le produit), dans toutes les tranches d’âge, et particulièrement chez les plus jeunes. Ce qui pose un réel problème de santé publique, puisqu’il est démontré que le cannabis est dangereux sur des cerveaux en formation, en gros pour la plupart des personnes, jusqu’à 20 ans. Pire, cette pénalisation du cannabis a induit plusieurs effets pervers. Le premier est une (sur)occupation des forces de police pour des crimes sans victimes, qui ne sont donc pas affectés à des tâches qui peuvent sembler plus prioritaires. Cet engorgement se poursuit dans les palais de justices (à titre d’exemple en 2014, 180000 dossiers concernant la détention ou l’usage de produits stupéfiants ont été transmis au parquet, la plupart du temps pour une boulette au fond de la poche. Enfin, la pénalisation de l’usage du cannabis permet surtout aux politiques et fins experts en statistiques du ministère de l’intérieur de tenir un outil d’affinage des chiffres. Un quidam arrêté avec une boulette sur lui, c’est une infraction constatée, une infraction résolue, et donc un taux de réussite de 100%. Ce qui est très chic dans les Powerpoint pour le ministre et l’opinion publique. Pourtant, personne ou presque dans nos parlementaires n’ose remettre en cause cette loi de 1970. Un sondage paru lundi 10 octobre montre montre pourtant que l’opinion publique, elle, change. 84 % des interrogés font le même constat : cette loi ne marche pas, elle n’empêche ni la consommation (croissante) ni le trafic (en conséquence), et elle coûte cher (environ 500 millions€ par an tout compris selon plusieurs sources). Alors que de part le monde certains pays ont déjà révolutionné avec succès leur approche répressive, pourquoi la France est-elle à la traine sur ce sujet ?

Esther Benbassa, sénatrice EELV, organisait ce lundi 10 octobre un colloque au Sénat avec des experts venus du monde entier (universitaires, médecins addictologues, policiers, juges…) pour faire le point sur cette question. On y était, et c’était passionnant !

Christophe Tisseyre

Vincent Massot

Anna Guillerm

Didier Mariani

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