Brighelli : enseigner les religions, oui, mais… (Le Point, 12 novembre 2014)

Esther Benbassa, sénatrice EELV, propose aujourd’hui une augmentation notable du temps scolaire consacré à l’étude des religions. Sans arrière-pensées, bien sûr…

 

Esther Benbassa est turco-israélo-française. Trois nationalités, et une seule conviction : défendre les droits apparemment malmenés des minorités. Voici qu’elle plaide, avec Jean-René Lecerf (UMP), pour l’établissement d’un recensement ethnique, un renforcement significatif de l’horaire consacré en classe à l’apprentissage des religions et la possibilité, dans les affaires de discrimination raciale ou religieuse, de plaintes collectives, à l’image des class actions américaines. Telles sont les conclusions d’un rapport sur les discriminations qui a déjà fait couler beaucoup de salive, la semaine dernière, au palais du Luxembourg.

Comme le souligne le Comité laïcité république, tout cela « relève d’une logique communautariste », et s’inscrit dans la logique des rapports remis l’année dernière à Jean-Marc Ayrault. Ils avaient alors été rejetés par le Premier ministre, mais avaient cependant été diffusés via le site officiel de Matignon.

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Statistiques ethniques

Quant aux statistiques ethniques qui pour Mme Benbassa sont une nécessité et une urgence (pourquoi faciliter le travail des futurs miliciens ?), elles sont une horreur : mes élèves sont français – je le leur dis quand bien même ils ne le savent pas. Et je renvoie Mme Benbassa aux paroles essentielles que le comte de Clermont-Tonnerre adressait aux Juifs pour leur signifier la fin des ghettos, à l’aube de la Révolution : « Il faut tout refuser aux Juifs comme nation et tout accorder aux Juifs comme individus. » Et deux siècles durant, les Juifs français ont eu pour premier souci de s’intégrer à la nation, y compris en participant à des banquets républicains qui faisaient la part belle aux charcutailles (lire sur ce sujet La République et le Cochon, de Pierre Birnbaum, Seuil, 2013). Il a fallu Hitler pour que le sentiment communautariste israélite remonte à la surface : ce sont au fond les nazis qui ont réinventé le Juif, par réflexe d’autodéfense. Mais, que je sache, nous ne sommes pas en guerre, et l’objectif espéré, c’est justement d’unifier, de fondre en un ensemble homogène, si possible harmonieux, les populations si diverses qui constituent la France. Bref, de les ouvrir à la culture commune de la maison commune. Le rôle de l’école est d’inciter à la paix. Et je postulerais volontiers que toutes celles et tous ceux qui plaident pour le communautarise préparent, parfois sans le savoir, sans le vouloir, la guerre.

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