Par Romain Massa
Depuis le week-end dernier, le New York Times lance une série de tribunes pour prôner la dépénalisation du cannabis sur tout le territoire américain. La très récente autorisation du cannabis à des fins médicales dans l’Etat de New York, et sa légalisation même à des fins récréatives au Colorado et dans l’Etat de Washington, ramène indirectement la question en France.
« Inutile de ressusciter des clivages »
Dominique Raimbourg l’un des trois signataires du rapport Vaillant, n’était « pas au courant » de la commercialisation du produit, puisque « très occupé en ce moment, sur la réforme pénale ». Lui aussi, ne voit pas l’intérêt de se mettre « une partie de la population à dos » après le « mariage pour tous ». « La période ne se prête pas à un nouveau débat clivant même si la réforme pénale ou la lutte contre la prostitution en font partie », poursuit-il. La probabilité du retour des cris d’orfraies sur la dépénalisation du cannabis effraie. Si le député se dit favorable à une « contraventionnalisation » Il précise : « Nous n’étions que trois députés à avoir signé le rapport, et entre un rapport et des discussion sérieuses au Parlement, le chemin est long ». Retour à la case départ.
Une dépénalisation pourrait rapporter de 300 à 500 millions d’euros à l’Etat
Esther Benbassa espérait relancer le débat en février dernier avec sa proposition de loi pour « autoriser l’usage contrôlé du cannabis. » Sans succès. Alors la situation décrite par Daniel Vaillant dans son rapport de 2011, reste inchangée: « La France s’illustre par une législation des plus répressives mais pourtant chez les 15-24 ans français, la consommation est l’une des plus élevées d’Europe ».
En réalité, la dépénalisation ou légalisation contrôlée du cannabis cache d’autres problèmes bien plus sinueux. « Selon un rapport entre 70 000 et 140 000 personnes vivraient du trafic de cannabis aujourd’hui » assure Dominique Raimbourg : « Peut-on priver ces gens d’un revenu ? » questionne t-il. Est-ce une manière d’acheter la paix sociale ? L’homme s’en défend « les trafics génèrent de la délinquance et des situations intenables dans les cités, il nous faut trouver une solution ». Une crainte de fouiller dans ce commerce souterrain si puissante qu’elle freinerait l’Etat à entreprendre la dépénalisation qui pourrait lui rapporter de 300 à 500 millions par an.
Les éditorialistes du New York Times lancent une initiative pour « la dépénalisation du cannabis sur tout le territoire ». Le quotidien américain a publié une édito fondateur pour annoncer la publication de tribunes futures de spécialistes ou lecteurs pour débattre de la question après l’ouverture des premiers « coffee-shops » au Colorado et dans l’Etat de Washington. Le journal n’hésite pas à mettre en rapport, la prohibition des années 20, période pendant laquelle « les américains respectueux de la loi sont devenus des criminels », avec l’interdiction de la marijuana qui a généré en 2012, 685,000 arrestations. Principalement des jeunes hommes noirs, le New York Times parle d’interpellations « racistes » propices « à la création de nouvelles générations de criminels ». L’éditorial parle d’une substance « bien moins dangereuse et addictive que l’alcool ou le tabac », même si les journalistes préconisent l’interdiction du cannabis pour les moins de 21 ans.