PJL n°691 :
Projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines
(PROCEDURE ACCELEREE)
– Discussion générale –
Jeudi 17 juillet 2014
Esther Benbassa, Sénatrice EE-LV
« Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Monsieur le rapporteur,
Mes ChèrEs collègues,
Nous examinons aujourd’hui le texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’individualisation des peines et à la prévention de la récidive.
Je veux le dire d’emblée, ce texte est une source de grande satisfaction pour le groupe écologiste.
D’une part parce qu’il constitue un véritable tournant pour la justice de notre pays. En effet, sans éluder la souffrance et la place des victimes, ni céder à un quelconque laxisme, il instaure de véritables alternatives à l’incarcération dont on sait qu’elle est bien souvent à l’origine de récidive.
La contrainte pénale, disposition phare du projet de loi, qui se déroulera en milieu ouvert, est ainsi une peine à part entière, une peine dont la finalité est de responsabiliser et de réinsérer le condamné dans notre société.
Nous souhaitons d’ailleurs avec force que cette nouvelle peine trouve rapidement toute sa place dans le système pénal, qu’elle soit véritablement appliquée et ne soit pas considérée par les magistrats comme une simple alternative au sursis avec mise à l’épreuve.
D’autre part parce qu’en élaborant un véritable texte de gauche, le Sénat a montré une fois de plus qu’il était capable non seulement d’esprit de consensus mais aussi d’ambition et de liberté.
Le succès de la commission mixte paritaire (CMP) était nécessaire à ce que les avancées introduites par le Sénat soient maintenues et défendues. Cela a été le cas et le texte que nous examinons aujourd’hui nous paraît faire preuve d’équilibre.
Je veux ici saluer votre travail, Madame la Garde des Sceaux, votre ténacité et votre engagement au service de cette réforme ambitieuse.
Nous regrettons, bien entendu, que la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, adoptée à l’initiative des écologistes et de notre rapporteur, n’ait pas été maintenue. Mais nous nous félicitons de l’engagement pris de la présentation, au premier semestre 2015, d’un projet de loi de réforme de la justice des mineurs et nous serons vigilants quant à la tenue de cet engagement.
Si nous déplorons également l’abandon de certaines mesures comme l’abrogation de la rétention de sûreté que nous appelions de nos vœux, nous partageons bien l’esprit de cette belle réforme.
En premier lieu le rétablissement d’une véritable individualisation des peines, qui passait par la suppression des mécanismes entravant la liberté d’appréciation des juges. Il était temps, mes chèrEs collègues, de mettre fin à cette aberration que sont les peines plancher ainsi qu’à la révocation automatique du sursis simple et du sursis avec mise à l’épreuve.
Au groupe écologiste, nous ne sommes ni dans l’idéologie ni dans l’angélisme mais guidés par un certain pragmatisme et par la conviction que la peine, la sanction, doit permettre aux auteurs d’infractions de réintégrer la société.
Les auteurs d’infractions doivent être sanctionnés et les victimes obtenir réparation mais avant tout, il faut trouver le moyen de vivre ensemble, dans une société pacifiée.
Et ce projet de loi, je le crois, y contribue.
Si, je l’ai dit, nous regrettons les quelques reculs du texte de la CMP par rapport à celui issu des travaux du Sénat, je veux aujourd’hui me concentrer sur les avancées, les véritables progrès que contient ce texte.
Ainsi, les conditions de sortie de détention seront particulièrement encadrées et ce, afin de lutter contre les « sorties sèches », véritable terreau de la récidive.
La priorité sera donnée à la préparation de la réinsertion des détenus aussi bien avant qu’après la sortie de prison. De surcroît, les conditions de mise en œuvre des aménagements de peine resteront celles inscrites dans la loi pénitentiaire et unanimement adoptées par notre Assemblée.
Enfin, la CMP, en retenant certaines propositions du Sénat, n’a pas fait l’économie du sort des plus fragiles de nos concitoyens.
D’une part en instaurant un mécanisme d’atténuation de peine pour les personnes atteintes de maladies mentales, atténuation couplée avec des obligations de soins.
D’autre part en entérinant la création d’une procédure de demande de mise en liberté pour motif médical au bénéfice des personnes placées en détention provisoire.
Cette disposition, qui reprend les termes d’une proposition de loi écologiste adoptée à l’unanimité par le Sénat en février dernier dont j’ai été la rapporteure, montre que le texte dont nous sommes saisis aujourd’hui permettra d’améliorer le droit et de combler certaines lacunes, certains vides juridiques.
En l’espèce, il s’agit de mettre un terme à une inégalité de traitement entre personnes condamnées et prévenues, en permettant également à ces dernières de bénéficier d’une suspension de peine quand leur état de santé est durablement incompatible avec la détention.
Pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, c’est avec conviction et sérénité que le groupe écologiste soutiendra ce texte et tous ceux qui contribueront, à l’avenir, à faire de notre société, une société plus juste et plus inclusive. »