Intervention d’Esther Benbassa lors de la discussion générale sur la proposition de loi visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire (30 avril 2014)

PPL n° 123 :

visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire

 

Discussion générale

Mardi 19 novembre 2013

Esther Benbassa, Sénatrice EE-LV

 

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Madame la rapporteur,

Mes ChèrEs collègues,

 

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire. L’exposé des motifs est limpide, il s’agit de sauver des vies.

Le nombre de blessés et tués sur la route, s’il est en constante baisse depuis de nombreuses années, reste trop élevé.

Le bilan provisoire pour le premier semestre 2013 fait état de plus de 32000 blessés et 1440 tués sur nos routes.

Or, les auteurs de la présente proposition de loi le rappellent, les premières minutes qui suivent un accident sont décisives. Selon les estimations qui nous sont données, ce sont 250 à 350 vies qui pourraient être sauvées chaque année si, sur les lieux d’un accident, les témoins possédaient la connaissance des gestes de premiers secours.

Qui pourrait alors ne pas voter une mesure dont la finalité est incontestable ?

Toutes les études en la matière montrent que les Français sont mal et peu formés aux gestes de premiers secours. Le rapport de notre collègue Catherine Troendle cite à cet égard un chiffre édifiant : selon une enquête menée par la Croix-Rouge en 2013, seules 55 % des personnes interrogées indiquent que leur premier geste serait d’avertir les secours. Dans le même sens, 50 % des personnes interrogées ne savent pas dûment placer un triangle de signalisation et donc protéger les lieux de l’accident.

Toutefois, si l’amélioration de la formation de nos concitoyens aux gestes de premiers secours apparaît comme une évidence, une lecture attentive du texte initial soulève de nombreuses questions et nous amène à être pour le moins réservés quant à l’opportunité de l’adopter.

D’abord, et cela a été dit à de nombreuses reprises, parce que les dispositions prévues par ce texte ne relèvent pas du domaine de la loi mais bien du règlement. C’est d’ailleurs cet argument qui avait conduit au rejet, par l’Assemblée Nationale, d’une proposition similaire l’année dernière. Nous sommes attachés au respect de la Constitution et nous devons être vigilant à ne pas outrepasser, si louable soit-elle l’intention, les prérogatives qu’elle nous donne.

Ensuite, parce qu’il existe des dispositifs généraux de formation aux premiers secours.

La loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière a créé une obligation de sensibilisation des candidats au permis de conduire à la formation aux premiers secours. Obligation restée lettre morte faute de décret d’application.

Il nous semble, au groupe écologiste, qu’il convient de faire appliquer la loi existante avant d’en élaborer de nouvelles et favoriser l’inflation législative.

Enfin, parce que le permis de conduire est un graal suffisamment dur à atteindre pour que la mise en place de ces mesures ne vienne entraver ce qui  représente pour beaucoup un sésame pour l’emploi et l’autonomie.

Pour toutes ces raisons, il aurait été difficile d’adopter le texte en l’état. Je veux alors saluer ici le travail de Madame la rapporteure qui a su entendre ces griefs et nous proposer un texte plus en phase avec la réalité de notre société.

En effet, le texte initial, en instaurant une épreuve supplémentaire au permis de conduite, aurait probablement eu pour conséquence une hausse du coût et des délais d’obtention du permis de conduire.

Le texte amendé par notre commission revient sur l’instauration de cette troisième épreuve, et l’on s’en félicite. Il instaure en revanche une obligation, pour les examinateurs de s’assurer que les candidats maîtrisent les gestes simples mais fondamentaux que sont : alerter les secours, sécuriser et baliser la zone de l’accident et, si nécessaire, procéder aux gestes de secours de base.

Considérant que cette mesure est bénéfique, le groupe écologiste votera ce texte tel qu’issu des travaux de la commission des lois.

Mais je voudrais rappeler qu’il faut également que cette formation, tellement nécessaire, soit mise en œuvre de manière effective dans le cadre de l’école et du travail afin que les connaissances en matière de premiers secours de l’ensemble de nos concitoyens soient approfondies et réactualisées tout au long de la vie.