INTERVIEW- Esther Benbassa est sénatrice Europe Écologie-les Verts (EELV) du Val-de-Marne et vice-présidente de la commission des lois du Sénat.
LE FIGARO. – Que pensez-vous des orientations et des préconisations de ce rapport?
Esther BENBASSA. -Elles sont intéressantes. Il faut favoriser le «nous inclusif et solidaire». Il est nécessaire qu’il y ait un engagement au plus haut niveau de l’État pour lutter contre les discriminations. Je suis favorable à ce que l’on change le mot «intégration», car la plupart des jeunes issus de l’immigration sont nés en France. Ils ont avant tout besoin d’être inclus dans la société française, et surtout de ne pas être montrés du doigt. Lorsqu’on parle d’intégration, c’est comme si on laissait entendre à ces jeunes qu’ils sont différents des autres. On renforce leur altérité. Il faut un changement de politique pour que la France réussisse à construire une nation unie et solidaire. Il est urgent de faire prendre conscience aux élites que la France est un pays aux populations hétérogènes. Cela a été le cas tout au long de son Histoire. Sa richesse vient de cette hétérogénéité, de Chagall à Yves Montand!
Jugez-vous la France trop repliéesur elle-même?
Aujourd’hui, il y a une crispation qui est plus dirigée contre l’islam que contre les descendants d’immigrés. Mais à force de renforcer l’altérité, c’est en haut lieu que l’on a créé le communautarisme. On recherche le confort moral avec les siens.
Faut-il autoriser le port du voile à l’école?
On peut régler ce problème en dehors de la loi. Certaines élèves voilées ont dû quitter l’école, c’est un échec. Il faut réaménager la loi, lui donner plus de souplesse, accepter que des mères voilées puissent accompagner des sorties scolaires, permettre la négociation entre la direction et les élèves au-delà de la loi pour que ces cas n’aboutissent pas à une impasse.