Ci-dessous le texte de l’intervention que j’avais prévu de présenter cet après-midi en séance (ce que je n’ai malheureusement pas pu faire, en raison d’un malaise qui m’a tenue éloignée du Sénat).
Intégralité du texte :
Monsieur le Président, Madame la Ministre, Madame la Rapporteure, Mes Cher⸱e⸱s collègues, avant d’entamer la discussion sur ce projet de loi, j’aimerais dire toute mon émotion à la suite de l’attentat de la synagogue de la Ghriba sur l’île de Djerba en Tunisie. Chaque année, à cette période, près de 4 000 fidèles se retrouvent pour effectuer le pèlerinage juif. Nous ne pouvons nier le caractère antisémite de cette attaque. En 2023, il est encore possible de mourir, d’être tué, parce que juif. C’est pourquoi il est nécessaire de continuer à mener le combat contre l’antisémitisme, l’obscurantisme et l’amnésie. Parce qu’on n’a pas le droit d’oublier l’horreur du régime nazi, les chambres à gaz, les millions de morts, les spoliations. Ces exactions avaient tous pour unique but l’extermination du peuple juif. Notre devoir d’histoire et de mémoire est immense.
Le 21 avril 2022, nous examinions la première loi de restitution des biens culturels spoliés. Je salue la détermination du Gouvernement à poursuivre son engagement en faveur de la reconnaissance et de la réparation des familles victimes de persécutions antisémites.
À ce sujet, le travail de recherche mené depuis des années porte ses fruits et mérite d’être encouragé et félicité. C’est grâce à cela que la mission Mattéoli a débouché sur la création de la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations pendant l’Occupation (CIVS). Il est donc indispensable d’octroyer des moyens supplémentaires pour développer la politique de recherche. De même rappelons, les travaux de l’ancienne sénatrice écologiste Corinne Bouchoux sur ce sujet dont un ouvrage sur Rose Valland. Il faut aussi souligner le travail remarquable et engagé entrepris par les musées nationaux et les bibliothèques afin d’identifier les biens culturels spoliés. On ne compte pas moins d’une dizaine de milliers d’œuvres toujours en circulation sur le marché de l’art ou dans les collections publiques. C’est pourquoi, il faut intensifier le travail d’investigation et de sensibilisation des établissements culturels.
Aujourd’hui, ce projet de loi marque un tournant inédit en droit français puisqu’il vient déroger au principe d’inaliénabilité des biens culturels du domaine public. Il vient simplifier la procédure de restitution contenue dans le code du patrimoine et permet aux ayants droits la possibilité de convenir d’un accord sur les modalités de réparation autre que la restitution. En effet, certaines familles souhaitent peut-être laisser leurs œuvres au sein des collections publiques en guise de témoignages de la tragédie historique et perpétuer en même temps le devoir mémoriel. Nous devons continuer à faire vivre à travers ces biens culturels spoliés, le récit des heures noires traversées par tant de familles brisées.