Restitution de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites

J’ai dédié mon intervention, sur la restitution de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes des persécutions antisémites, à ma grand-tante Victoria Matalon, émigrée d’Izmir pour Marseille dans les années 20, déportée à Auschwitz avec sa famille.

Intervention en séance :

Intégralité du texte prononcé :

Monsieur le Président, 

Madame la Ministre,

Cher⸱e⸱s Collègues,

À l’heure où certains tentent de réhabiliter le régime de Vichy dans le débat public, c’est avec émotion que je m’exprime aujourd’hui sur ce texte de réparation, de mémoire et de vérité. 

Emmanuelle Polack, éminente spécialiste de l’art sous l’Occupation, le rappelle dans ses travaux : l’art fut un des piliers de la politique nazi. Moins d’une semaine après la prise de Paris, en juin 1940, des officiers allemands listent les œuvres, scellent les collections et pillent tableaux et sculptures. Ne l’oublions pas, cette spoliation sera également organisée par l’État français, conformément à sa politique antisémite, qui atteint son paroxysme lors de l’adoption de la loi du 22 juillet 1941, en ordonnant la confiscation de tous les biens juifs non encore bloqués. 

Le travail de restitution effectué lors de la Libération fut conséquent, certes, mais incomplet. La mission Mattéoli estime que sur les 100 000 œuvres spoliées, 60 000 furent rapatriées et 45 000 rendues à leurs propriétaires. Environ 2000 sont aujourd’hui présentes dans nos musées, sous le statut particulier de MNR, qui facilite leur restitution.

Cependant, d’autres pièces, pour lesquelles la trace de spoliation avait disparu au cours du temps, se trouvent dans les collections publiques de nos musées. Protégées par l’article L. 451-5 du code du patrimoine les qualifiant d’inaliénables, seule la voix législative peut acter un transfert de propriété de ces œuvres. C’est donc une partie tragique de notre histoire que nous réparerons, en les déclassant pour les restituer. 

Je ne doute pas que le travail de la mission consacrée à la recherche et à la restitution des biens culturels spoliés permettra la restitution de nombreuses œuvres dans un avenir proche. Il est indispensable d’octroyer des moyens supplémentaires à cette mission pour lui permettre de développer son activité. J’estime également qu’il est de notre devoir de travailler sur l’établissement d’une loi-cadre, afin de faciliter ce processus de restitution, démesurément dépendant d’un calendrier législatif souvent surchargé.

Je voterai donc POUR ce texte, dont la portée historique met en lumière les stigmates de notre passé et la difficulté à corriger celui-ci, à une époque où, je le rappelle, notre société se retrouve menacée par des courants politiques révisionnistes et antisémites. 

Merci.

SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI