Un an et demi après l’abandon du méga-complexe EuropaCity, le gouvernement vient de présenter son plan pour le Val d’Oise. Jean Castex était à Gonesse ce vendredi matin pour annoncer toute une série de mesures pour relancer l’Est du département et en particulier le Triangle de Gonesse. Parmi les annonces phares : la création d’une nouvelle cité scolaire, la rénovation de plusieurs hôpitaux ou encore la construction de la gare de la ligne 17 du Grand Paris express qui divise très largement les sénateurs.
« Je sais que l’abandon d’EuropaCity il y a 17 mois par le gouvernement fut un coup dur pour de très nombreux acteurs du territoire, à commencer par les élus qui espéraient tant de ce projet. Beaucoup d’entre vous ont alors eu le sentiment que le Val d’Oise était une nouvelle fois le parent pauvre de l’aménagement du Grand Paris et même de l’Île -de-France. Mais il se trouve que le gouvernement porte une ambition forte voulue par le président de la République : celle de n’abandonner aucun de ses territoires ».
C’est avec cette déclaration tranchante, en préambule de son discours ce vendredi matin à Gonesse, que le Premier ministre a lancé la présentation de son « plan pour le Val d’Oise ». Un vaste plan « pour donner une nouvelle force à la dynamique d’aménagement du territoire et de croissance » du département « le plus pauvre d’Ile-de-France » qui fait suite à l’abandon par le gouvernement d’EuropaCity, un méga-complexe de commerces et de loisirs.
« Macron a eu peur de quelques zadistes »
Vivement contesté depuis des années par un front de plus en plus large d’opposantsnotamment écologistes, ce projet porté par la filiale d’immobilier commercial du groupe Auchan et le groupe chinois Wanda, promettait d’attirer quelque 30 millions de visiteurs par an au prix d’un investissement de plus de 3 milliards d’euros et de l’artificialisation de 80 hectares de cultures céréalières.
« Cela devait être un site ‘wahou’ et qui devait changer l’image du Val d’Oise d’un point de vue économique, touristique et commercial. Quand Emmanuel Macron était ministre de l’Economie, il avait donné son feu vert pour le démarrage de ce grand projet. C’était le plus gros investissement privé de France. Mais quand il est devenu président de la République, il a eu peur de quelques zadistes et il a changé d’avis parce qu’il a voulu envoyer des signaux aux écolos. Les gens d’Auchan sont tombés de leur armoire. Ils avaient déjà dépensé près de 70 millions d’euros rien que pour les études… », regrette Sébastien Meurant, sénateur LR du Val d’Oise.
A la place, c’est donc un plan gouvernemental qui a pour objectif de relancer une grande majorité de secteurs en grosse souffrance dans un département où le taux de chômage flirte avec la barre des 20 % et où 17 % des habitants vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Rénovation d’hôpitaux, construction de commissariats, un Rungis local…
Parmi les annonces phares du chef du gouvernement ce matin à Gonesse, on notera la restructuration des hôpitaux de Pontoise ou encore d’Argenteuil, la construction d’un nouveau commissariat à Sarcelles et de l’extension de celui de Cergy, le lancement d’un nouveau programme de rénovation urbaine sur les projets reconnus d’intérêt national de Garges-lès-Gonesse, Villiers Le Bel et Sarcelles, l’implantation d’une extension du marché alimentaire de Rungis ou encore la construction d’une nouvelle cité scolaire à vocation internationale, mais surtout la réalisation de la ligne 17 du Grand Paris express qui était le projet le plus attendu par les élus locaux et les Valdoisiens.
« Cette gare témoigne du manque d’ambition du gouvernement sur l’écologie »
Un projet de gare controversée de la ligne 17 du métro du Grand Paris sur les terres agricoles du Triangle de Gonesse qui se situe entre les pistes d’atterrissage des aéroports du Bourget et de Roissy-Charles-de-Gaulle que les sénateurs écologistes continuent de dénoncer après s’être déjà très largement mobilisés contre EuropaCity.
« Bien sûr que je suis pour les habitants du Val-d’Oise puissent avoir des transports dignes de ce nom, mais en tant qu’écologiste, je suis contre ce projet de gare à Gonesse. Ce sont des terres qui constituent le poumon de Paris et le gouvernement a décidé de construire cette gare dans des champs où l’on peut produire une agriculture locale et permettre aux gens des environs de manger et d’acheter local », peste la sénatrice de Paris, Esther Benbassa, qui préconise plutôt d’agrandir la gare de Villiers-le-Bel.
« Il faut arrêter avec l’artificialisation des sols. Cette gare est le témoignage du manque d’ambition du gouvernement sur l’écologie. Il y aura une mobilisation très suivie la semaine prochaine, avec des collectifs d’habitants », ajoute l’élue écologiste.
« Ils vont retourner à leurs petites pâquerettes et nous laisser travailler »
Des critiques que fustige en bloc la sénatrice LR du Val d’Oise, Jacqueline Eustache-Brinio. « Sur cette nouvelle gare et sur la ligne 17 du métro, les zadistes vont comprendre qu’on maintenant va faire sans eux. Ils vont retourner à leurs petites marguerites et leurs pâquerettes. On est tous écolos, l’écologie n’appartient à personne, mais là, il faut aider les Valdoisiens et désenclaver le département », lance l’élue, en rappelant que « Le Val-d’Oise est le seul département qui n’a aucun lien routier avec le périphérique parisien ».
Un sentiment que partage son collègue Rachid Temal. « Madame Benbassa ne connaît pas le dossier et ce qu’elle dit est mensonger. Ça commence à bien faire tous ces gens qui viennent en balade le dimanche dans le Val-d’Oise et qui nous expliquent comment il faut vivre. Sur le triangle de Gonesse où sera construite la gare, il n’y a pas de terres agricoles qui permettent aux Valdoisiens de manger des produits locaux », tacle le sénateur socialiste du Val-d’Oise.
« Qui va payer et quand ? »
Mais là où les sénateurs, de tous bords politiques confondus sont plus perplexes, même s’ils reconnaissent unanimement « l’annonce de projets structurants et essentiels pour le développement du département », c’est sur le calendrier et sur le plan de financement.
« On a eu une espèce de catalogue du père Noël, et même si on est plutôt globalement satisfaits de toutes ces annonces, il faut maintenant les mettre en œuvre. Le gouvernement doit très vite nous donner un calendrier précis et nous dire qui va financer chacun des projets car l’Etat ne pourra pas tout financer tout seul », anticipe Jacqueline Eustache-Brinio.
Même son de cloche pour son collègue Sébastien Meurant. « Nous avions un projet à 3 milliards d’euros avec EuropaCity où tout était financé par le privé. Aujourd’hui, on se retrouve avec un projet moins ambitieux et qui va devoir être financé par de l’argent public. Qui va payer ? Les collectivités locales évidemment ! », râle le sénateur LR du Val-d’Oise.
« Les élus locaux doivent être associés »
Sur le calendrier, Rachid Temal promet également de ne pas relâcher la pression sur l’exécutif. « Je suis comme Saint Thomas : je n’ai toujours pas vu ni entendu le calendrier et le plan de financement. Est-ce un tour de passe-passe avant les élections présidentielles où est-ce une réalité ? », lance le sénateur socialiste, qui regrette « le manque d’ambition du plan gouvernemental pour les emplois et le logement » et que « les élus locaux seront associés au pilotage de ce vaste plan ».
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