La chambre haute du Parlement a donné son feu vert, mercredi soir, pour réformer la justice pénale des mineurs. Cette réforme, qui vise dans les faits à accélérer les jugements, est décriée par la gauche.
La réforme de la justice pénale des mineurs fait son chemin au Parlement. Le Sénat a adopté mercredi soir, en première lecture, le projet de loi portant cette réforme, qui vise notamment à « simplifier la procédure pénale applicable aux mineurs délinquants ». Cette réforme est jugée trop « répressive » par la gauche.
L’Assemblée nationale avait adopté le projet de réforme au mois de décembre. Députés et sénateurs doivent maintenant s’accorder sur un texte commun en commission mixte paritaire, ce qui paraît atteignable. « Les débats ont montré une convergence sur l’essentiel », relève le sénateur du groupe RDPI à majorité En Marche Thani Mohamed Soilihi.
Les sénateurs ont demandé quelques modifications au projet, comme une entrée en vigueur au 30 septembre plutôt qu’au 31 mars comme le prévoit pour l’heure le projet. Le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti dit avoir « pris acte » de cette demande. Selon la rapporteure Les Républicains Agnès Canayer, l’objectif est de lui « donner toutes les chances d’atteindre son objectif de réduction de la délinquance ».
Remplacer l’ordonnance de 1945
Le projet de loi adopté à main levée est la ratification d’une ordonnance. Une méthode unanimement critiquée sur les bancs du Sénat. Le code de la justice pénale des mineurs qu’elle organise a vocation à remplacer l’ordonnance de 1945 consacrée à la délinquance juvénile. La sénatrice centriste Dominique Vérien en attend « une amélioration pour l’enfant jugé mais aussi pour la victime ».
Le projet de réforme met en place une procédure en deux temps, avec l’objectif de diminuer le recours à la détention provisoire, qui concerne aujourd’hui 80 % des mineurs emprisonnés.
Une première audience devra statuer sur la culpabilité dans des délais de trois mois – contre 18 mois actuellement en moyenne. Une seconde audience devra se tenir dans un délai compris entre six et neuf mois, pour le prononcé de la sanction peine ou mesure éducative.
Dans l’intervalle, le mineur sera soumis à une période de « mise à l’épreuve éducative », qui peut comporter des mesures éducatives et des mesures de sûreté. Une « audience unique » restera possible pour des mineurs déjà connus de la justice.
Le juge des enfants réinvesti dans le projet sénatorial
Contre l’avis du gouvernement, les sénateurs ont confié à un juge des enfants et non au juge des libertés et de la détention, la décision de placer un mineur en détention provisoire. De même, ils ont confié au juge des enfants les contraventions les moins graves, pour lesquelles le tribunal de police était compétent.
Le code prévoit également une présomption d’ irresponsabilité avant 13 ans. Concernant l’épineuse question du « discernement », débattue bien au-delà des institutions ces dernières semaines, notamment grâce à la libération de la parole sur l’inceste, la Chambre haute s’est rangée à la définition du gouvernement selon laquelle le mineur « a compris et voulu son acte » et « est apte à comprendre le sens de la procédure pénale ».
L’amendement de la sénatrice Valérie Boyer retoqué
La gauche a pour sa part voté contre le texte. La présidente du groupe Communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE) à majorité communiste, Eliane Assassi, dénonce « une dérive répressive ». L’écologiste Esther Benbassa juge, elle, « le rapprochement de la justice des mineurs de celle des majeurs problématique ». « Un mineur en conflit avec la loi doit être considéré avant tout comme un enfant à protéger », complète Laurence Harribey du Parti socialiste.
Mercredi soir, un amendement proposé par la sénatrice Les Républicains Valérie Boyer a provoqué un moment de crispation. Il visait à créer « un contrat d’engagements » pour « responsabiliser » les familles, assorti de pénalités financières. Il n’a finalement pas été adopté.
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