14 décembre 2020 | Sénat
Veuillez trouver ci-dessous mon intervention lors de la NL PJL Code de la sécurité intérieure :
Ci-dessous le texte de l’intervention :
Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Rapporteur,
Mes cherEs collègues,
L’objectif de ce texte est, dans la continuité de la loi SILT de 2017, de proroger dans le droit commun des mesures d’exception, actuellement appliquées à titre expérimental.
Ces dispositions, attentatoires aux libertés individuelles, ainsi qu’au respect de la vie privée, revêtaient pour l’heure un caractère temporaire. Le législateur, en 2017, avait ainsi estimé raisonnable de limiter leur application au 31 décembre 2020.
Cette échéance arrivant à son terme, l’exécutif s’est tout naturellement saisi de cette question. Deux choix s’offraient à lui. L’abrogation, si la représentation nationale estimait que ces dispositifs n’avaient pas fait leurs preuves. Leur pérennisation si, au contraire, l’efficacité de telles mesures pour la sûreté de nos concitoyens avait été démontrée..
A ces options légitimes, le Gouvernement a préféré une troisième voie : celle d’une prorogation de ces dispositifs, estimant que la crise sanitaire pourrait être de nature à biaiser les discussions parlementaires. Cette décision a été assortie d’un enclenchement de la procédure accélérée, privant de fait le législateur d’un débat parlementaire sérieux et éclairé.
Ainsi était-il proposé à l’article 1 de proroger de 7 mois des dispositions de la Loi SILT, conférant à la police administrative des pouvoirs trop importants, notamment, de déclarer la fermeture temporaire des lieux de culte, d’ordonner des mesures individuelles de contrôle et de surveillance, ainsi que de réaliser des visites domiciliaires. Dans son article 2, le projet de loi prévoit également une prorogation similaire pour les algorithmes votée en 2015 et prolongée en 2017. Ceux-ci permettent notamment de détecter les menaces terroristes via les réseaux internet et de téléphonie mobile.
En première comme en nouvelle lecture, le Sénat a souhaité non pas proroger mais pérenniser les mesures prévues à l’article 1. Cette décision n’a, semble-t-il, pas fait l’unanimité en Commission Mixte-Paritaire, puisque celle-ci s’est révélée non-conclusive.
Pour le Groupe « Ecologiste, Solidarité et Territoire », ni la pérennisation ni la prorogation ne sont des solutions, dans la mesure où nous nous opposons à l’intégration dans le droit commun de ces mesures de police administrative, loin d’être anodines.
Comment accepter que la loi française bascule dans une dimension si sécuritaire, faisant la part belle au soupçon, à l’arbitraire, aux dérives, à la stigmatisation par l’administration, au détriment de tout contrôle du juge judiciaire ?
Comment accepter le recours aux algorithmes, alors qu’entre 2017 et 2018, ceux-ci n’ont permis d’identifier que dix personnes à risque et qu’aucune d’elles ne présentait un danger sérieux pour la sécurité nationale ? En attente de dispositifs algorithmiques plus sophistiqués, susceptibles de nous apporter des résultats plus probants, il est préférable que nous privilégiions la dotation massive de nos renseignements de moyens humains et financiers.
Monsieur le Ministre, si l’objectif de cette loi était de trouver un équilibre entre la liberté de nos concitoyens et leur sécurité, je crains hélas que nous soyons pour l’heure bien loin de l’atteindre.
Sans débat démocratique réel, sans bilans sérieux de ces mesures, celles-ci ne sauraient être prorogées, ni pérennisées. Pour ces raisons, le « Groupe Ecologiste, Solidarité et Territoires » votera, comme en première lecture, contre ce texte.
Je vous remercie.
SEUL LE PRONONCE FAIT FOI