Référendum sur Aéroports de Paris : les 4,7 millions de signatures sont-elles encore atteignables ?

Au bout d’un mois, le compteur s’élève à un peu plus de 500 000 signataires opposés à la privatisation d’Aéroports de Paris.

 Des militants Gilets jaunes s’opposent à la privatisation d’Aéroports de Paris.
Officiellement, pas question pour les anti-privatisation d’Aéroports de Paris de se décourager. Et pourtant, le seuil des presque 4,7 millions de signatures, nécessaire pour que la procédure du référendum d’initiative partagée (RIP) se poursuive, semble chaque jour de plus en plus inatteignable.

Entre l’ouverture des signatures le 13 juin dernier et le 1er juillet, soit deux semaines et demie plus tard, le compteur a atteint 480 300 signatures, validées par le Conseil constitutionnel. Ce dernier ne communique un nombre qu’une fois par mois, mais des compteurs indépendants moulinent les données en temps réel.

Selon la plateforme adprip.fr, on atteint ce vendredi matin 510 332 signataires, soit presque 11 % des plus de 4 700 000 de voix nécessaires au 12 mars prochain. Autant dire que trouver près de 4,2 millions de gens nouveaux en neuf mois, soit en moyenne quotidienne un peu plus que lors des premières semaines, semble compliqué.

« 1 ou 2 millions, ce sera déjà une victoire symbolique »

« Je ne suis pas inquiet, on est rentré en période estivale. Si on est à un million ou un million et demi à la fin de l’année, là ça deviendra compliqué », veut croire Patrick Kanner, patron du groupe socialiste au Sénat, interrogé par le Parisien. Sa collègue écologiste Esther Benbassa renchérit : « Il ne faut pas se décourager, la démocratie ça s’apprend ! ». La sénatrice reconnaît dans la foulée que « si on arrive à 1 ou 2 millions, ce sera déjà une victoire symbolique », faisant référence au seuil qu’Emmanuel Macron a annoncé vouloir abaisser à 1 million.

Derrière cet optimisme de façade, ces parlementaires accusent les autorités de leur mettre des bâtons dans les roues. Sur le compteur de signataires, d’abord. Dans les textes, rien n’oblige le ministère de l’Intérieur à publier régulièrement le nombre de signataires, en parallèle du comptage mensuel du Conseil constitutionnel. « Rien n’interdit non plus de les donner », rétorque Patrick Kanner, qui demande la mise en ligne quotidienne « non pas du chiffre à l’unité près, mais d’une estimation à titre indicatif ». « On a l’impression que c’est un secret d’Etat, alors que le fait de publier un nombre chaque jour aurait un effet d’entraînement », argue Jean-Pierre Sueur, autre sénateur socialiste. Contacté par le Parisien, le ministère de l’Intérieur répond qu’il « n’a pas accès au décompte des soutiens, le législateur ne nous a pas donné cette compétence ».

Les élus aimeraient aussi que les mairies permettent aux citoyens de se faire assister dans leurs locaux pour apposer la signature en ligne. Il faut dire que la démarche est un peu complexe aux yeux de certains, puisqu’il faut remplir de nombreuses informations d’identité, ainsi qu’un code de sécurité. Au moment de remplir le formulaire, beaucoup d’internautes se sont plaints d’y avoir passé plusieurs dizaines de minutes, sans compter le bug de serveur qui a eu lieu les premières heures. La place Beauvau assure ce vendredi que « des améliorations ont déjà pu être apportées dans la navigation pour permettre aux utilisateurs d’accéder rapidement aux pages essentielles », et dit « réfléchir à faire évoluer l’ergonomie du site ».

La loi prévoit de mettre en place dans chaque canton un endroit pour pouvoir venir remplir sa signature, en se faisant assister si besoin. « Il y a 2 000 cantons, donc ça fait 2 000 endroits, alors qu’il y a environ 36 000 communes en France. Imaginez une personne âgée, elle ne va pas forcément pouvoir se déplacer sur 30 km », tonne Patrick Kanner. L’ancien ministre de la Ville souhaite aussi que le ministère « demande aux préfets et aux maires d’informer les citoyens » sur cette campagne. La place Beauvau dit avoir déjà indiqué aux préfets le 4 juin que « les maires qui le souhaitent peuvent mettre en place une borne pour le recueil des soutiens ».

Réunions au ministère et au CSA le 23 juillet

Insuffisant pour quelques dizaines de parlementaires de gauche, qui se sont réunis jeudi devant le ministère de l’Intérieur pour exprimer ces doléances.

Pour les aborder directement avec Christophe Castaner, il faudra attendre le 23 juillet prochain. Ce jour-là, se tiendra Place Beauvau la première réunion du « comité de suivi », avec les chefs de groupes parlementaires. Le même jour, un autre rendez-vous est déjà calé, avec le CSA cette fois, toujours à la demande des élus. « On souhaite que le CSA sensibilise les chaînes au sujet du référendum. Pour le grand débat, il y a eu des dizaines d’heures de direct. Pourquoi n’y aurait-il rien pour une démarche officielle et constitutionnelle ? », s’interroge Patrick Kanner, qui reconnaît que le CSA n’aura pas de pouvoir contraignant sur le contenu des chaînes de télé.

« La plupart des gens que je rencontre et à qui j’en parle me disent qu’ils sont contre la privatisation. Ils se souviennent de la privatisation des autoroutes et de ses effets », argue Jean-Pierre Sueur. Et Patrick Kanner de conclure : « On ne lâchera rien, même si le ministère continue à retenir les informations. »

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