Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Mes cherEs collègues,
Débutés il y a quelques mois, nos travaux venant réformer les statuts de l’autonomie polynésienne touchent à leur fin. Une fois n’est pas coutume – et c’est à saluer – l’Assemblée nationale et sa majorité présidentielle ont accepté de jouer le jeu du compromis parlementaire, en soutenant nombre d’apports constructifs issus du Sénat, et en permettant à la commission mixte paritaire d’aboutir positivement. La Polynésie française méritait bien un tel sens des responsabilités.
Nous avons toutes et tous eu l’occasion de le rappeler en première lecture, la situation dans ces territoires ultramarins est préoccupante. Avec ses 24% de chômeurs, son climat propice aux catastrophes naturelles et ses services publics défaillants, cette collectivité d’Outremer nécessite une transformation profonde de ses statuts.
Cette réforme, promise aux Polynésiens qui ont été consultés préalablement à la rédaction du PJL et du PJLO, est cependant partielle.
Evidemment, nous soutenons le nouvel acte de décentralisation qui entraîne un réajustement équilibré des compétences entre l’Etat et les institutions polynésiennes puisque Paris ne peut exercer convenablement son administration au sein des territoires polynésiens à près de 20 000 km de ceux-ci. De même nous saluons les mesures visant à redynamiser le dialogue social et le tissu économique local. En somme, ces textes de loi ont pour objectif de rendre le droit appliqué en Polynésie plus lisible et de pouvoir régir ces territoires à une échelle plus proche et plus adaptée aux besoins des habitants de l’archipel.
Mais en tant qu’élue écologiste, je ne peux que regretter le manque de courage environnemental du Gouvernement et de la droite sénatoriale. De nombreux amendements, qui auraient pu substantiellement aller dans le sens de la protection de l’environnement, vous ont été soumis en première lecture, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, par les divers groupes de gauche. Tous ont été rejetés.
Je ne peux m’empêcher de m’interroger : pourquoi une telle frilosité ?
A l’heure de la sixième extinction de masse des espèces vulnérables, la préservation du patrimoine naturel polynésien est un enjeu majeur. La Polynésie française ne peut être appréhendée sans reconnaître la dimension hautement culturelle et sociale qui lie ses habitants à son environnement et à ses ressources naturelles.
De ce fait, nous aurions pu espérer un soutien renforcé de l’Etat dans la protection de la biodiversité des récifs coralliens polynésiens, notamment lors de l’exploitation commerciale des terres rares.
Des dispositions venant renforcer la lutte contre la pêche illégale et la surpêche industrielle vidant nos océans auraient également été nécessaires. La Zone Économique Exclusive (ZEE) Polynésienne s’étend en effet sur 5,5 millions de km2. Les eaux polynésiennes sont riches en poissons et attirent de nombreuses flottilles étrangères qui violent nos eaux territoriales. Face à ces activités, préserver la biodiversité marine si chère à la Polynésie est une responsabilité de l’Etat français.
Nous déplorons également qu’aucune mesure n’ait été adoptée en faveur d’une protection accrue des plages locales. A l’échelle mondiale, sur les 275 millions de tonnes de plastiques produits, près de 10 millions finissent dans les océans. A ce rythme, à l’horizon 2050 il y aura davantage de déchets plastiques que de poissons dans les fonds marins. Ce phénomène pourrait avoir des répercussions dramatiques sur la santé humaine et animale. Pour preuve, 100 000 animaux – notamment des tortues et des oiseaux de mers – sont tués par les plastiques chaque année. Une plus grande vigilance dans ce domaine relève de l’urgence.
Enfin, au regard du climat nettement tropical des outremers, nous avions les moyens de devenir les champions des énergies propres, notamment hydraulique et solaire, et ainsi pallier la fin du nucléaire énergétique polynésien. Une telle transition ne semble pourtant pas être une priorité pour l’exécutif.
Mes chers collègues, Il faut reconnaitre que ces deux textes présentent des lacunes. Mais ils constituent également dans leur ensemble une avancée législative relativement importante et prometteuse. Les Polynésiens ont besoin d’un droit plus clair, plus adapté, d’une économie plus sociale et florissante, d’un environnement plus sain et préservé. Ces textes sont les premières pierres de cet édifice.
Je vous remercie.