Prise de parole d’Esther Benbassa sur l’article 12 quinquies du PJL ELAN

Je me suis exprimée le 18 juillet 2018 à propos de l’article 12 quinquies du PJL ELAN qui prévoyait de nouvelles dérogations à l’interdiction de construction sur les littoraux.

 

Prise de parole article 12 quinquies

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Mes cherEs collègues,

Le présent article tend à mettre à mal les principes posés par la Loi Littorale de 1986. Celle-ci permettait pourtant de tenir un équilibre – certes précaire – entre une préservation nécessaire de nos littoraux et la prise en compte de la démographie croissante, à laquelle doit faire face notre pays. Pour se faire, cette loi se fondait sur deux principes : un développement urbain uniquement dans la continuité des villes et villages existants déjà, ainsi que la protection pour des raisons environnementales et esthétiques des littoraux sur un espace de 100 mètres auprès des rivages.

Le présent article 12 quinquies prévoit la remise en cause de ces éléments, en validant le principe de construction sur les littoraux, si celles-ci se font pour des besoins de logements ou de développements du service public.

L’intention est louable. Nous avons certes besoin de plus de service public et de davantage de logements, notamment pour les plus précaires. Cependant cette solution comporte un écueil de taille : elle est la porte ouverte  à toutes les dérives. Si une dérogation était faite pour le service public et le logement social, qu’est ce qui empêcherait plus tard la prolifération sur les littoraux de complexes hôteliers ou de locaux relevant du secteur privé ?

Alors même que la loi ALUR permettait déjà un certains nombres de dérogations fermement encadrées, afin de densifier et améliorer l’offre de logements, l’exécutif, au service du lobby de l’immobilier, souhaite étendre cette possibilité, contrevenant ainsi à toute logique environnementale.

Monsieur le Ministre, mes cherEs collègues, sachez que si vous maintenez cet article en l’état, vous aurez l’opinion publique contre vous. En effet, une pétition, lancée par les mondes associatifs et scientifiques visant à protéger nos littoraux de toutes constructions nuisibles a récemment recueilli près de 360 000 signatures. Elle avait par ailleurs notamment le soutien d’un membre du Gouvernement, en la personne de Nicolas Hulot. Si cet article venait à être adopté, j’ose espérer que ce dernier en tirerait les conclusions en remettant sa démission au Président de la République.

Cependant, cette décision nécessiterait un certain courage politique,  ainsi que des valeurs. Nous le constatons chaque jour depuis le début de cette mandature, cette équipe gouvernementale semble dépourvue de ces deux éléments.

« Make our planet great again » avait dit il y a un peu plus d’un an Emmanuel Macron, exhortant les chefs d’Etat du monde à tenir leurs engagements internationaux en matière environnementale. Cela ne concernait de toutes évidences, pas la préservation de nos littoraux.

Je vous remercie.