7 novembre 2020 | Le Journal du Dimanche
Alors que l’Assemblée nationale a adopté début octobre une proposition de loi allongeant le délai légal de l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse, ces 79 députés et sénateurs de tous bords exhortent le gouvernement « à l’inscrire à l’ordre du jour du Sénat, pour en accélérer l’adoption ».
La tribune : « Le droit à l’avortement est la cible d’une offensive conservatrice planétaire. En France, l’égalité entre les femmes et les hommes a été érigée en grande cause du quinquennat. Pourtant, ce droit fondamental y subit également des atteintes. Ce sont les inégalités sociales et territoriales d’accès à l’avortement, dénoncées par les professionnels de santé et les associations qui accompagnent les femmes depuis des années. C’est aussi le refus par certains médecins de pratiquer une interruption volontaire de grossesse, qui retarde parfois le processus.
Des voix tentent de freiner la navette parlementaire. Nous ne les laisserons pas y parvenir
L’Assemblée nationale a adopté le 8 octobre en première lecture une proposition de loi transpartisane visant à renforcer l’accès à l’IVG. Le texte s’attaque à ces inégalités en allongeant les délais légaux de 12 à 14 semaines de grossesse ou en permettant aux sages-femmes de pratiquer des IVG instrumentales. Rien n’est gagné pour autant. Les obstacles sont encore nombreux. Des voix individuelles et collectives s’opposent toujours à ce texte et tentent de freiner la navette parlementaire. Nous ne les laisserons pas y parvenir.
Nous, parlementaires engagés pour le droit à l’avortement, appelons le gouvernement à reprendre la proposition de loi et à l’inscrire à l’ordre du jour du Sénat, pour en accélérer l’adoption. Pour envoyer un message net à ceux qui veulent contrôler le corps des femmes. Par respect pour la démocratie parlementaire. Et pour que l’IVG soit un droit réel pour toutes les femmes.
Si le gouvernement est suspendu à la saisine du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), nous estimons que la défense du droit à l’avortement mérite mieux qu’un faux débat. D’ailleurs, pourquoi avoir saisi le CCNE aussi tardivement, alors même que la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale travaillait sur cette question depuis plus d’un an?
La proposition de loi que nous soutenons n’est seulement pas la nôtre, c’est celle de toute la société
Certains prétendent que l’avortement à 14 semaines serait plus dangereux pour la santé des femmes. Nous rappelons que nos voisins européens le pratiquent déjà bien au-delà de nos 12 semaines réglementaires, et ce sans risque particulier. De plus, c’est oublier l’impact d’une grossesse non désirée sur la santé des femmes. Les complications liées à la poursuite d’une grossesse – qu’elles soient médicales ou psychologiques – sont bien supérieures à celles liées à l’IVG.
La proposition de loi que nous soutenons n’est seulement pas la nôtre, c’est celle de toute la société. Celles des femmes d’abord, contraintes d’aller avorter à l’étranger ou de poursuivre une grossesse non désirée. Celle des associations, qui accompagnent quotidiennement les femmes. Celle des professionnels de santé, qui nous alertent depuis des années sur les difficultés d’accès à l’IVG. Celle enfin des progressistes qui affirment le droit fondamental plein et entier des femmes à disposer librement de leurs corps. Nous ne pouvons plus les faire attendre. »
Les signataires : Cathy Apourceau-Poly (PCF), Clémentine Autain (LFi), Delphine Bagarry (NI), Erwan Balanant (MoDem), Marie-Noëlle Battistel (PS), Guy Benarroche (EELV), Esther Benbassa (EELV), Joël Bigot (PS), Hussein Bourgi (PS), Anne Brugnera (LREM), Rémi Cardon (PS), Emilie Cariou (NI), Emilie Chalas (LREM), Annie Chapelier (Agir Ensemble), Guillaume Chiche (NI), Laurence Cohen (PCF), Hélène Conway-Mouret (PS), Marie-Pierre de la Gontrie (PS), Monique de Marco (EELV), Jérôme Durain (PS), Rémi Féraud (PS), Caroline Fiat (LFi), Jean-Luc Fichet (PS), Paula Forteza (NI), Albane Gaillot (NI), Guillaume Garot (PS), Raphaël Gérard (LREM), Hervé Gillé (PS), Laurence Harribey (PS), Dimitri Houbron (Agir Ensemble), Victoire Jasmin (PS), Patrice Joly (PS), Régis Juanico (PS), Eric Kerrouche (PS), Michel Larive (LFi), Annie Le Houerou (PS), Jean-Yves Leconte (PS), Marion Lenne (LREM), Claudine Lepage (EELV), Marie-Noëlle Lienemann (GRS), Monique Lubin (PS), Didier Marie (PS), Serge Mérillou (PS), Michelle Meunier (PS), Marie-Pierre Monier (PS), Cécile Muschotti (LREM), Sébastien Nadot (NI), Danièle Obono (LFi), Matthieu Orphelin (NI), Mathilde Panot (LFi), Valérie Petit (Agir Ensemble), Christine Pirès Beaune (PS), Sébastien Pla (PS), Eric Pouillat (LREM), Angèle Préville (PS), Loïc Prud’homme (LFi), Richard Ramos (MoDem), Muriel Ressiguier (LFi), Sylvie Robert (PS), Laurence Rossignol (PS), Daniel Salmon (EELV), Hervé Saulignac (PS), Gabriel Serville (GDR), Jean-Pierre Sueur (PS), Aurélien Taché (NI), Sophie Taillé-Polian (Génération.s), Rachid Temal (PS), Jean-Claude Tissot (PS), Sylvie Tolmont (PS), Jean-Louis Touraine (LREM), Boris Vallaud (PS), Sabine Van Heghe (MRC), Marie-Claude Varaillas (PCF), Yannick Vaugrenard (PS), Michèle Victory (PS), Stéphane Viry (LR), Delphine Batho (NI), Patrick Kanner (PS), Cédric Villani (NI).
Mise à jour du 8 novembre à 16 heures : 3 députés se sont ajoutés après publication de la tribune faisant passer le nombre de signataires de 76 à 79.
Lien de l’article : https://www.lejdd.fr/Politique/76-parlementaires-appellent-le-gouvernement-a-accelerer-ladoption-de-la-proposition-de-loi-sur-lavortement-4003965