Municipales. Des tensions entre le PS et EELV perdurent, malgré de nombreux accords

Alors que les listes pour le second tour des élections municipales du 28 juin ont été déposées, certaines tensions persistent entre socialistes et écologistes. Malgré les alliances trouvées, les ambitions d’EELV font de l’ombre au Parti socialiste. La question du leadership à gauche est posée.

La préparation du second tour des municipales, malgré de nombreux accords locaux, a créé certaines tensions entre socialistes et écologistes, les seconds étant désormais en mesure de prendre un poids équivalent dans des grandes villes et de poursuivre leur dynamique en vue de la présidentielle.

Déterminés à faire mordre la poussière à la droite ou à LREM au soir du 28 juin, verts et roses ont conclu de nombreux accords dans tout l’hexagone. Au niveau national, ça ne se passe pas mal, reconnaît Julien Bayou, secrétaire national d’EELV.

« Il ne peut pas y avoir de jeu de concurrence entre nous, ça n’a pas de sens quand il s’agit de construire une alternative politique crédible pour le pays », lui fait écho Pierre Jouvet, porte-parole du PS.

Pas d’accord et de la rancœur à Strasbourg et Lille

Cette apparente bonne volonté de part et d’autre ne masque cependant pas les difficultés rencontrées localement. Nous, on est habitués à ce que le PS soit devant, mais eux, ils ne sont pas habitués à nous soutenir, affirme M. Bayou.

La dynamique de l’union a ainsi échoué à Strasbourg et Lille, où socialistes et Verts se rejettent la responsabilité de l’échec, en faisant courir le risque pour la gauche de perdre ces deux métropoles. À Strasbourg notamment, le PS réclamait la présidence de la métropole, pas acceptable pour les Verts.

Les socialistes ont partout demandé la présidence des communautés de communes. Ce n’est pas comme ça qu’on peut travailler en vue de l’élection présidentielle, se désole Esther Benbassa, sénatrice EELV de Paris. Selon elle, il y a un combat de résistance du PS, les baronnies s’accrochent, elles sont le dernier rempart du parti.

À Lille, Martine Aubry veut faire la majorité absolue à elle toute seule, regrette lui aussi M. Bayou. Mais il y a match, Stéphane Baly peut l’emporter, assure-t-il, en allusion au numéro un de la liste écolo.

À Grenoble, seule grande ville dirigée par EELV, le PS ne fait pas non plus partie de la plateforme du maire sortant Eric Piolle. À Poitiers, une triangulaire se profile entre le maire sortant PS, LREM et l’union de la gauche menée par EELV.

Leadership à gauche

En revanche, des accords ont été finalisés dans plusieurs grandes métropoles : là où EELV avait fait de meilleurs scores au premier tour, les têtes de liste sont EELV (Bordeaux, Toulouse, Besançon ou Marseille). Là ou le PS est déjà bien implanté – Rouen, Nantes, Rennes…- ce sont les socialistes qui mènent le jeu. Ensemble, on garantit que ces villes ne basculeront pas à droite, affirme M. Bayou.

Dopés par leurs bons résultats aux Européennes de 2019 et au premier tour des municipales (11,1 % des voix dans les villes de plus de 30 000 habitants, contre 4,1 % en 2014), EELV n’entend plus jouer les supplétifs des socialistes comme par le passé et postule clairement aujourd’hui au leadership à gauche, selon les politologues et enseignants à Sciences-po Grenoble, Florence Gougou et Simon Persico. Mieux encore, le 15 mars dernier, EELV a remporté 16,4 % des voix (contre 10,2 % en 2014) quand le parti avait la tête de liste.

S’ils parviennent à conquérir un nombre significatif de mairies, alors ils auront acquis un statut qui leur aura longtemps échappé et qui détermine, au fond, le sort des familles politiques sous la Ve République : celui de parti capable de gagner des élections à deux tours, analysent les deux politologues, dans une étude réalisée pour la Fondation de l’écologie politique.

Côté PS, on reconnaît volontiers la perte de l’hégémonie des socialistes à gauche. Mais il ne faudrait pas que d’autres se voient hégémoniques, affirme M. Jouvet. Après la débâcle de 2017, on était une gauche groggy, quasiment sortie du jeu politique, mais grâce au « rassemblement, on est en mesure de garder Paris, Nantes, Rennes, Rouen, Villeurbanne… et de remporter Lyon, Marseille, Toulouse. Ne gâchons pas cela par des petites phrases. L’écologie sans le social n’existe pas, le social sans l’écologie ne marchera pas », souligne M. Jouvet.