Lettre et réponse du Président de la République sur la persécution des Ouïgours en Chine et sur le cas emblématique du professeur Tiyip Tashpolat

Objet : Persécution du peuple ouïgour en Chine et cas emblématique du professeur Tiyip Tashpolat.

Monsieur le Président de la République,

Par le présent courrier j’ai l’honneur d’attirer votre attention sur une situation hautement préoccupante.
Il semble en effet que la population ouïgoure, une minorité musulmane du nord-ouest de la Chine, subisse actuellement un génocide d’un genre nouveau de la part des autorités chinoises. Si ces dernières n’en sont pas encore venues à manifester ouvertement une volonté d’extermination de cette population, elles la soumettent aujourd’hui à une révoltante sinisation forcée, qui devrait à terme aboutir à l’annihilation du souvenir même de la culture ouïgoure.
Depuis les années 1990, la Chine mise à la fois sur un développement économique et sur une politique sécuritaire répressive sur le Xinjiang, afin de conserver un contrôle sur cette province où réside la minorité ouïgoure. Ce développement économique n’a jamais bénéficié au peuple local, qui fait désormais l’objet d’une oppression intolérable.
Les Ouïgours sont aujourd’hui internés massivement dans des camps de « formation professionnelle », où ils subissent un endoctrinement politique en faveur du régime, ainsi qu’une rééducation religieuse et culturelle. Est également réalisé le fichage de leurs données ADN à des desseins pour le moment justifiés par un souci d’ordre public. Enfin, les autorités pékinoises encouragent une migration massive des chinois Han dans cette province, afin d’éradiquer les spécificités locales et d’assimiler de force les ouïgours du Xinjiang.
La situation du professeur Tiyip Tashpolat, président de l’Université du Xinjiang, mais également docteur honoris causa de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE, Université Paris Sciences & Lettres), où je suis moi-même directrice d’études émérite, illustre parfaitement la gravité des exactions perpétrées par le régime chinois. Monsieur Tashpolat a été arrêté en mai 2017 à l’aéroport de Pékin. Il est aujourd’hui condamné à la peine capitale, avec deux ans de sursis, après avoir été accusé de « double jeu », c’est-à-dire d’avoir feint l’assimilation à la culture chinoise dans le but de promouvoir le séparatisme des ouïgours.
Monsieur le Président, peut-être jugerez-vous opportun d’inviter nos partenaires à l’international à vous rejoindre dans un discours de vérité adressé aux dirigeants chinois : l’oppression culturelle des populations du Xinjiang, ainsi que les menaces qui pèsent sur les intellectuels ouïgours tel que Tiyip Tashpolat doivent impérativement être levées.
Défenseure des droits humains, des droits des minorités et du respect des spécificités culturelles et religieuses, la diplomatie française peut sûrement agir contre la persécution du peuple ouïgour et venir en aide à mon collègue Tiyip Tashpolat, victime emblématique de cette persécution. Je vous serais pour ma part très reconnaissante si vous pouviez intervenir en ce sens.

Vous remerciant par avance de l’accueil que vous voudrez bien réserver à ma requête, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de mon profond respect.

Esther BENBASSA, Sénatrice EELV de Paris
Directrice d’études à l’EPHE (Sorbonne)

 

Réponse du Directeur de Cabinet d’Emmanuel Macron, Patrick Strzoda