Discussion générale (budget asile et immigration)

Le jeudi 28 novembre, Esther Benbassa intervenait dans l’hémicycle, en tant qu’oratrice pour le groupe CRCE, dans le cadre du PLF asile et immigration.

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Monsieur le Rapporteur,

Mes CherEs collègues,

En Novembre 2019, la Cimade, Médecins du monde, Amnesty International et une vingtaine d’autres associations dénonçaient par une lettre ouverte la politique punitive du Gouvernement français à l’endroit des migrants.

Peu avant son élection à la Présidence de la République, le candidat Macron louait pourtant la politique migratoire de Madame Merkel, qui avait « sauvé la dignité de l’Europe ».

Par la suite, les accents humanistes utilisés sur la question de l’asile ont été remplacés par des gages à peine voilés aux populistes. La première étape de cette évolution a bien évidemment été la Loi Asile et Immigration. Depuis, les discours ambigus sont multiples et on parle désormais de quotas migratoires.

La Mission  « Asile, Immigration et Intégration », telle qu’elle nous est présentée aujourd’hui, n’est d’ailleurs pas de nature à nous rassurer.

En 2018, 2260 migrants sont morts noyés en Méditerranée. L’horreur que doit susciter ce chiffre devrait nous inciter à adopter des orientations financières diamétralement opposées aux PLF votés ces dernières années.

Pourtant, le budget qui nous est soumis est particulièrement déséquilibré, tant la part belle y est faite au financement de la lutte contre l’immigration irrégulière, au détriment de l’intégration et de l’accès à la nationalité française.

En matière d’immigration comme d’asile, la bienveillance affichée de l’Exécutif a disparu. Obnubilé par sa chasse électorale sur les terres de LR et du RN, le Gouvernement fait tout pour décourager les exilés de venir en France, alors que ceux-ci fuient la guerre, la famine, les instabilités politiques et parfois même les dérèglements climatiques.

Monsieur le Ministre, une fois de plus et c’est le cas depuis 2015, vous minorez le nombre de migrants qui vont arriver sur notre territoire. De ce fait, les crédits de cette Mission sont parfaitement sous-budgétisés.

Vous revendiquez une politique migratoire dissuasive et inhumaine : ainsi, alors que près de 2000 exilés sont sans logement dans la capitale, vous ne souhaitez pas créer de nouvelles places d’accueil en 2020. Dans le même temps, vous investissez 41,2 millions d’euros dans la création de Centres de Rétention Administrative neufs, tout en refusant d’augmenter les budgets des prises en charge et d’accompagnement social des personnes retenues.

Voilà qui en dit long sur votre volonté d’expulser et d’enfermer, plutôt que d’accueillir et d’intégrer.

Finalement, la seule donnée réjouissante de ce PLF est l’augmentation du budget de l’OFPRA à hauteur de 20 millions d’euros. Une disposition qui avait par ailleurs été demandée l’an passé par le Groupe CRCE. Monsieur Nuñez nous avait alors opposé un refus catégorique.

Ce budget est donc bien insuffisant ! Et il ne vient certainement pas rompre avec le désengagement de l’Etat, qui oblige les associations à compenser l’inaction des pouvoirs publics, en s’engageant aux côtés des demandeurs d’asile.

Ainsi, je vous le demande, Monsieur le Ministre : À quand une politique migratoire digne, capable de répondre à cette crise de l’accueil ? À quand des places supplémentaires ouvertes aux primo-arrivants dans les CADA, afin de contrer la création de nouveaux camps de fortune dans nos rues ? À quand une aide juridique  effective pour tous ces requérants, pris au dépourvu devant la complexité des procédures de l’OFPRA ? À quand une revalorisation de l’ADA et un meilleur accompagnement des migrants vers l’emploi?

Vous l’aurez compris, Monsieur le Ministre, nous ne cautionnons pas votre politique inique. En cohérence avec ses convictions, le Groupe CRCE ne saurait voter ces crédits.

Nous ne voulons pas de quotas de migrants économiques. Ni l’enfermement d’enfants dans les CRA. Ni la répression des migrants aux frontières.

Ni de votre budget insincère.

Je vous remercie.