« Plusieurs personnalités écologistes appellent à maintenir la marche des fiertés LGBT de Marseille, que la mairie et la Préfecture rechignent à autoriser. Nous publions leur tribune.
Mardi 27 juin 2017, les organisateurs de la Pride Marseille ont rencontré la Préfecture des Bouches-du-Rhône et la Mairie dont ils dénoncent dans un communiqué la « quasi-indifférence » et demandent « avec la plus grande fermeté » à ce que la marche du 29 Juillet ait l’autorisation d’avoir bien lieu.
Quand à Istanbul, le pouvoir politique censure la Pride et les revendications politiques, quand en Tchétchénie les homosexuels sont torturés dans des camps de concentration ou assassinés par leur famille pour laver l’honneur, quand à Murcie en Espagne et à Lyon les néo-nazis perturbent la marche des fiertés, quand à Paris celle-ci se déroule dans la plus grande sérénité, quand en France les actes homophobes ont augmenté de 20% en 2016, quand à Marseille l’homophobie de la cité étouffe la communauté, l’interdiction ou l’autorisation d’une marche des fiertés dans la deuxième ville de France ne devraient même pas être en débat.
Nous demandons donc à ce que l’Etat et les municipalités apportent à toutes les Prides en France et à celle de Marseille les éléments de sécurisation des parcours. Les associations LGBT n’ont pas vocation comme le titan Atlas à porter le poids du monde. Elles n’en ont pas les moyens financiers.
UN NON-SENS HISTORIQUE ET POLITIQUE
Interdire les Prides serait un non-sens historique. Toute l’histoire des luttes LGBT pour la reconnaissance des droits de vivre et d’aimer quelles que soient notre orientation sexuelle ou notre identité de genre, c’est la visibilité politique et la présence dans la rue. Ces luttes sont nées dans la rue, autour du bar Stonewall Inn à New-York en 1969. C’étaient des émeutes contre le harcèlement policier, contre l’indifférence et l’archaïsme politique. Ces luttes se perpétuent depuis dans la rue et y resteront pour demeurer visibles. Car invisible ou invisibilisée, une fierté, emprisonnée entre quatre barrières de chantier, est une colombe sans ailes. Invisibles ou invisibilisées, les revendications liées à nos fiertés sont plongées dans l’obscurité et la Raison est dangereusement frappée de cécité.
L’ignorance et l’absence de raison ont mené à la construction de normes sociales sectaires, dont l’expression est violence: l’homophobie, l’hétéronormie, la marginalisation des relations homosexuelles et des relations libres dans la Loi, l’absence d’accès à la PMA pour tous les couples de femmes, l’actuel et si confortable refus politique de la GPA, mais aussi l’inégalité salariale entre les personnes sans justification raisonnable. On peut faire beaucoup avec la haine et l’ignorance – trop d’exemples hélas nous viennent à l’esprit – mais on peut faire encore plus avec l’amour et l’éducation.
L’interdiction des marches pour les Prides serait aussi un non-sens politique. L’interdiction municipale est un choix par nature intenable dans la durée. Une Pride n’est pas un outil, elle est une idée, et une idée ne meurt jamais: une Pride ne meurt jamais. Les frustrations provoquées par les interdictions renforcent l’ardente détermination à voir des marches des fiertés surgir avec ou sans autorisation.
DESOBEISSANCE CITOYENNE
Le droit d’aimer sans considération de genre ou d’orientation sexuelle – parce que l’amour qui n’est pas libre n’est rien – ne s’obtiendra pas sans actes. Est-ce là l’endroit de l’exercice des libertés fondamentales de la République? Sans aucun doute. Est-ce là l’endroit de la désobéissance citoyenne ? Probablement. Une Pride est un phoenix qui renaît plus ardent que jamais de ses cendres. Nous saluons ainsi la «Rainbow March» (photo), qui a eu lieu mercredi soir à Marseille.
Ecologistes, nous avons célébré en 2004 la première union homosexuelle en France grâce à Noël Mamère, maire de Bègles. Ecologistes, nous avons défendu en 2012 contre tous les conservatismes le Mariage pour Tous à l’Assemblée Nationale et au sein du gouvernement. Ecologistes, nous avons défendu à l’Europe qu’une feuille de route sur l’égalité pour les personnes LGBTI soit établie et qu’une définition inclusive de la famille soit présente dans les politiques de l’Union.
L’AMOUR CELEBRE LA VIE, ON AIME ET ON LUTTE COMME ON VEUT.
Ecologistes, nous signons aujourd’hui ce texte car une fois encore, face à un immense enjeu, face à un dogme, face au terrorisme, nous devons faire preuve de courage et ne pas céder à la tentation facile d’un repli moribond. L’amour célèbre la vie. Nous la devons à tous les jeunes rejetés de leurs familles pour leur orientation sexuelle ou leur identité de genre. Nous la devons à toutes les personnes discriminées ou brutalisées. Une agression homophobe, c’est l’envol d’une pièce de monnaie dont on ne sait pas de quelle côté elle va retomber. Un côté peut être fatal. L’autre coté est toujours un stigmate, une déchirure à porter à vie.
Demandez donc à Zak, séquestré et violé dans une chambre d’hôtel à Marseille. La pièce de monnaie était sur la tranche, 36 heures durant. Marseille naîtra une nouvelle fois quand nous aurons accepté un fait pourtant si simple et si tendre : on aime et on vit comme on veut. Et pour cela, on lutte comme on veut, quand on veut. »
Signataires:
Noël Mamère, Maire de Bègles
Cécile Duflot, ex-Ministre au gouvernement du Mariage pour Tous
Esther Benbassa, Sénatrice écologiste
Jacques Boutault, Maire du 2ème arrondissement de Paris
Sergio Coronado, ex-député en faveur du Mariage pour Tous
Michèle Rivasi, Eurodéputée
Michèle Rubirola, Conseillère Départementale des Bouches-du-Rhône
Jean-Laurent Félizia, co-porte-parole régional EELV Paca
Théo Challande, EELV Marseille & co-fondateur de La Manif Vraiment pour Tous
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