PLFSS pour 2018 – Amendement PMA et intervention d’Esther Benbassa en séance (16 novembre 2017)

Retrouvez ci-dessous le texte de l’amendement visant à ouvrir, à toutes les femmes, la procréation médicalement assistée (PMA), déposé par Esther Benbassa dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Cet amendement a été déclaré irrecevable pour des questions financières. Vous trouverez également ci-dessous le texte de son intervention dans l’hémicycle pour dénoncer cette décision. 

 

Amendement N°476 rect.

Présenté par : Mmes  BENBASSA et COHEN, M. WATRIN, Mme ASSASSI, M. BOCQUET, Mme CUKIERMAN, MM.  FOUCAUD, GAY et GONTARD, Mme GRÉAUME, MM.  P. LAURENT et OUZOULIAS, Mme PRUNAUD et M. SAVOLDELLI

Article additionnel après l’article 34 bis

Après l’article 34 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

  1. – L’article L. 2141‑2 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’assistance médicale à la procréation a également pour objet de répondre à la demande parentale d’un couple de femmes. » ;

2°  Le second alinéa est ainsi modifié :

  1. a) Au début de la première phrase, après les mots : « l’homme et la femme », sont insérés les mots : « ou les deux femmes » ;
  2. b) À la seconde phrase, les mots : « l’homme ou la femme » sont remplacés par les mots : « l’une des deux personnes formant le couple ».
  3. – Après l’article L. 2141‑2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2141‑2‑… ainsi rédigé :

« Art. L. 2141‑2‑… – L’assistance médicale à la procréation a également pour objet de répondre à la demande parentale d’une femme majeure, en âge de procréer. »

III. – L’article L. 2141‑10 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au 1°, les mots : « de l’homme et de la femme formant le couple » sont remplacés par les mots : « des deux membres du couple ou de la femme » ;

2° Au dernier alinéa, les mots : « ou les concubins » sont remplacés par les mots : « , les concubins ou la femme ».

  1. – L’article 311‑20 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le couple ayant consenti à une assistance médicale à la procréation est composé de deux femmes, la filiation avec la conjointe est judiciairement déclarée. L’action obéit aux dispositions des mêmes articles 328 et 331. »

  1. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

 

Objet

En conformité avec les recommandations du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes (HCE) et l’avis favorable du Conseil Consultatif National d’Ethique (CCNE), le présent amendement propose de mettre fin à une inégalité fondée sur l’orientation sexuelle et la situation conjugale, en autorisant l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes célibataires.

Pour garantir l’égalité d’accès entre les personnes souhaitant avoir recours à la PMA, il convient de prévoir le remboursement par la Sécurité sociale de ces procédures pour tous.

Les auteurs du présent amendement proposent, pour compenser cette dépense, d’augmenter la taxation du tabac responsable au même titre que les pesticides, le bisphenol A, les perturbateurs endocriniens et le stress à la baisse de fertilité. Selon une étude menée par des chercheurs européens et parue dans la revue Human Reproduction Update le 25 juillet 2017, la moyenne des spermatozoïdes des hommes a déjà diminué de 60% en quatre décennies.

 

Prise de parole sur article

Jeudi 16 novembre 2017

Esther Benbassa, Sénatrice écologiste, rattachée au groupe CRCE

« Monsieur le Président,

Madame la Ministre,

Mes ChèrEs collègues,

J’avais déposé, avec la majorité des membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et Ecologiste, un amendement visant à ouvrir, à toutes les femmes, la procréation médicalement assistée (PMA).

Sur la question de l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, le précédent quinquennat s’était distingué par un regrettable recul du gouvernement. Craignant que l’exécutif actuel, malgré des déclarations d’abord volontaristes, n’en fasse autant, nous avions décidé de replacer cette question d’égalité, mais aussi de santé publique, au cœur du débat politique.

Cet amendement a été déclaré irrecevable, en application du fameux article 40 de la Constitution, au motif qu’il prévoyait la prise en charge par l’assurance maladie de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes, créant pour cette dernière une charge publique.

Cette décision appelle, me semble-t-il, plusieurs commentaires.

Si l’on considère l’ouverture de la PMA à toutes les femmes comme un enjeu d’égalité, il convient bien sûr qu’elle soit prise en charge par l’assurance maladie comme elle l’est pour les couples hétérosexuels. Nous avions donc pris soin de gager cette dépense en prévoyant une hausse de la taxation du tabac, responsable, au même titre que les pesticides, le bisphenol A, les perturbateurs endocriniens et le stress, de la baisse de fertilité.

Dans le cas de cet amendement, le gage n’a pas suffi et le Président de la commission des finances, sans motiver plus avant sa décision, a purement et simplement supprimé cette question des débats.

Or l’interdiction de l’accès de la PMA, si elle relève au mieux de l’hypocrisie, au pire de la discrimination basée sur l’orientation sexuelle, a également d’importantes répercussions sur le plan sanitaire. Les solutions alternatives « bricolées » par les parents, exposent, notamment, les femmes aux infections et maladies sexuellement transmissibles. Ces affections, évitables, étant pour leur part prises en charge par l’assurance maladie, on voit bien la vacuité du motif d’irrecevabilité de notre amendement.

Je vous remercie. »

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