Indre-et-Loire : pourquoi l’unique centre de déradicalisation français a été fermé (« France Info », 28 juillet 2017)

Le ministre de l’Intérieur a confirmé, vendredi 28 juillet, la fermeture du site de Pontourny dans l’Indre-et-Loire, le seul centre de déradicalisation en France qui devait faire office de « laboratoire ». Franceinfo analyse ce fiasco.

Un échec cuisant. L’unique centre de déradicalisation en France va fermer après moins d’un an d’existence. L’expérience au château de Pontourny, en Indre-et-Loire, « ne s’est pas révélée concluante », a résumé, vendredi 28 juillet, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb. Ce centre « ouvert, sur la base du volontariat, a montré ses limites », a-t-il ajouté dans un communiqué. Franceinfo revient sur les raisons de cet échec.

Parce qu’il n’a pas accueilli autant de volontaires que prévu

Ce site pilote devait annoncer l’ouverture d’autres centres du même type d’ici fin 2017. Mais le site de Pontourny, ouvert en septembre, n’a jamais répondu au critère du nombre de pensionnaires à atteindre. D’une capacité de 25 personnes, il n’accueillait déjà plus personne en février. Au total, neuf pensionnaires, des jeunes radicalisés en voie de marginalisation, y ont séjourné mais aucun d’entre eux n’a suivi l’intégralité du programme prévu, précise le ministre.

« L’ouverture d’un tel site était menée à titre expérimental. Aujourd’hui, l’évaluation montre que l’expérience n’est pas concluante. La grosse limite du projet, c’est effectivement le volontariat. Ce principe pose question, il ne répond pas à la réalité du processus de radicalisation », reconnaît Muriel Domenach, secrétaire générale du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), contactée par franceinfo. « Désormais, on va travailler pour identifier les personnes pour lesquelles une prise en charge peut être adaptée. On va plutôt partir des besoins et chercher à créer des structures adaptées aux publics », précise-t-elle. Le ministère de l’Intérieur parle « d’ouvrir des structures de petite taille pour y accueillir des individus sous main de justice et y développer des solutions alternatives à l’incarcération ».

« L’idée du centre elle-même ne pouvait pas marcher. Les gens ne vont pas aller quelque part pour se déradicaliser tout seuls », abonde sur franceinfo Esther Benbassa, sénatrice EELV du Val-de-Marne et co-directrice de la mission d’information sénatoriale « désendoctrinement, désembrigadement et réinsertion des jihadistes en France et en Europe ».

« Il faut trouver une idéologie de remplacement aux radicalisés, et reconstruire ce lien citoyen. Aujourd’hui, nous n’avons pas grand chose à leur offrir. Je ne suis pas optimiste sur ce type de centre car il est difficile pour ces gens de revenir en arrière », complète sur franceinfo Nathalie Goulet, sénatrice UDI de l’Orne et vice-présidente de la Commission des Affaires étrangères de la Défense et des Forces armées du Sénat.

Parce qu’il était coûteux

La mission d’information du Sénat a également critiqué aussi la « gabegie financière » de l’Etat face à un « phénomène complexe, multifacettes, qui attend des réponses nombreuses et pas seulement répressives ».

La sénatrice (LR) Catherine Troendlé, qui a participé au rapport sénatorial, a de son côté rappelé dans un communiqué que Pontourny avait « 2,4 millions d’euros de coût de fonctionnement », une somme qui pourrait « servir utilement à la mise en place d’appartements éducatifs » par exemple.

« La déradicalisation est un miracle et si vous ne croyez pas en les miracles, il vaut mieux prendre des chemins pragmatiques plutôt que de mettre en place ces centres coûteux, ces expériences qui n’aboutissent pas », développe Esther Benbassa.

Parce qu’il a rencontré de nombreuses hostilités au niveau local

Dès le début, le projet du centre de déradicalisation a été très controversé et a rencontré de nombreuses difficultés. « Les préfets n’ont pas joué le jeu car ils ne croyaient pas dans le concept, le village n’était pas d’accord car il avait peur que ce soit des terroristes et le maire de Beaumont-en-Véron n’a pas marché non plus », constate Esther Benbassa. Des élus locaux avaient également demandé des critères particuliers, qui excluaient tout pensionnaire condamné pour violences, ou encore tout personne fichée « S ». Or, certaines personnes radicalisées ont un passé délinquant.

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