Débat sur les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales (19 juillet 2016)

Textes n° 780, 781, 782

Propositions de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales

 

Discussion générale

Mardi 19 juillet 2016, 6 minutes

Esther Benbassa, Sénatrice EE-LV

 

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre de l’Intérieur,

Monsieur le Président de la commission des lois,

Monsieur le Rapporteur,

Mes ChèrEs collègues,

 

Le Sénat a ouvert la séance en rendant hommage aux victimes de l’attentat qui a frappé Nice le 14 juillet. Permettez-moi de m’associer à cet hommage, en mon nom et en celui du groupe écologiste dont toutes les pensées vont vers les victimes, leurs familles et leurs proches… Celles de Nice bien sûr mais aussi celles de Bagdad et d’ailleurs.

Pour revenir à ce qui nous occupe aujourd’hui et moins d’un mois après la première lecture, nous examinons trois propositions de loi relatives aux modalités d’inscription sur les listes électorales, déposées par nos collègues députés Elisabeth Pochon (PS) et Jean-Luc Warsmann (LR), dans leur rédaction issue de la Commission mixte paritaire.

Comme je l’ai dit il y a quelques semaines, l’enjeu est majeur puisqu’il s’agit de lutter contre l’abstention et d’encourager nos concitoyens à reprendre le chemin des urnes.

Le groupe écologiste se réjouit donc que la Commission mixte paritaire soit parvenue à un accord, dans un esprit constructif et ce afin d’agir, de manière concrète et à court terme, sur les causes de la « mal-inscription » ou de la non-inscription.

Rappelons ici les chiffres édifiants dont faisait état le rapport élaboré en 2014 par les auteurs des PPL « Mieux établir les listes électorales pour revitaliser la démocratie » : près de 9,5 millions d’électeurs mal-inscrits ou non-inscrits sur les listes électorales !

Si l’on considère que tout Français majeur non privé du droit de vote est électeur, soit environ 45 millions de personnes, cela revient à priver le corps électoral de notre pays de plus de 20% de ses membres !

Nous avons soutenu, au groupe écologiste, ces textes lors de la première lecture, nous les soutiendrons encore aujourd’hui. Les modalités d’inscription sur les listes électorales devraient être rénovées et modernisées. La possibilité, pour tout électeur, de s’inscrire au plus tard le sixième vendredi précédant ce scrutin et l’abandon de la révision annuelle des listes électorales, l’extension des inscriptions d’office aux citoyens naturalisés ainsi que l’ensemble des dispositions qui nous sont soumises aujourd’hui y participeront sans aucun doute.

Mais puisque le sort réservé à ces textes est acquis ce dont nous nous réjouissons ;

Puisque j’ai eu l’occasion, lors de la première lecture, de rappeler l’urgence d’une réflexion sur les causes politiques de l’abstention et sur l’absolue nécessité de la refondation profonde de nos institutions ;

Permettez-moi, mes chèrEs collègues, de faire une petite digression et de vous parler, ou plutôt de vous reparler, du droit de vote des étrangers aux élections locales.

Beaucoup a été dit sur ce sujet et tout a été promis. Aujourd’hui, le constat est décevant. Peu d’énergie a été mobilisée pour mener à bien cette réforme majeure qui aurait été aussi, j’en ai la conviction, de nature à « revitaliser la démocratie » pour reprendre les termes de nos collègues Elisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann.

Accorder le statut d’électeur à ces milliers de femmes et d’hommes qui vivent en France, travaillent en France et paient leurs impôts en France, voilà  ce qui sans nul doute aurait donné un souffle nouveau à notre démocratie vieillissante, voire vacillante.

Bien sûr je n’ai pas la naïveté de penser que cette réforme verra bientôt le jour, l’exécutif y a renoncé il y a bien longtemps maintenant. Quitte à réviser la Constitution, c’est la déchéance de nationalité qui lui a été préférée.

Toutefois, je ne perds pas de vue l’aspect tout à fait positif des mesures qui seront votées aujourd’hui mais je voudrais dire ma conviction, en ces temps graves et particulièrement difficiles, que le droit de vote pour les résidents étrangers est un outil d’intégration à la République dont on ne saurait se passer encore trop longtemps.