« Dans un entretien exclusif à la Gazette des communes, la sénatrice (EELV) Esther Benbassa, lève le voile sur les premières conclusions de sa mission d’information sur la déradicalisation. L’occasion de livrer son point de vue, sans langue de bois, sur les polémiques qui visent la prise en charge des candidats au djihad.
Vous êtes à l’origine de la création en mars 2016 d’une mission d’information sur « la déradicalisation », le désembrigadement, le désendocrinement et la réinsertion. Où en sont vos travaux ?
Avec Catherine Troendlé, sénatrice (LR) qui s’est associée à cette mission d’information, nous avons procédé à de nombreuses auditions et fait un certain nombre de déplacements sur ce sujet de la « déradicalisation », terme impropre, mais largement diffusé. Elle a pris du retard, en raison de la complexité et la sensibilité de la question, mais elle touchera bientôt à sa fin. Nous devrions boucler notre rapport fin février-début mars.
Que ressort-il de cette mission ?
Ce que nous avons découvert est quelque peu déroutant parce qu’inattendu. L’impression générale est que les pouvoirs publics, pressés de rassurer la population, ont débloqué beaucoup d’argent pour mettre en œuvre cette « déradicalisation ». Mais le résultat n’est pas assez sérieux et confine au bricolage. Une bonne partie des associations et des structures subventionnées n’ont pas les compétences pour investir ce sujet. On peut parler d’un relatif fiasco.
Vous faites référence au cabinet de Dounia Bouzar, qui fut longtemps présentée comme la référence et qui est aujourd’hui mis en cause pour ses résultats ?
Dounia Bouzar a quand même bénéficié d’un financement de 930 000 euros alors qu’elle n’était pas, me semble-t-il, préparée à appréhender le domaine avec les outils nécessaires. Ses livres ne sont pas assez convaincants pour offrir un « modèle de déradicalisation » susceptible d’être repris. Elle dit avoir déradicalisé plusieurs jeunes femmes mais celle qu’elle a montré dans les médias a fini, je crois, par partir en Syrie !
Echec également avec Sonia Imloul et son association en Seine-Saint-Denis.
Quant à l’Unismed, qui a remporté récemment l’appel d’offre pour intervenir sur toute la partie sud de la France, le discours de son président nous est apparu décousu. De même que l’Association française des victimes du terrorisme (AFVT), dont on a compris qu’elle recourait à un prestataire extérieur pour faire le travail.
N’avez-vous donc rencontré aucune bonne pratique ?
Si. Mais pas forcément parmi celles qui s’affichent dans les médias. Nous avons par exemple auditionné l’association Accord 68 à Mulhouse, dirigée par Jean-Claude Keller. Le travail qui y est mené est sérieux et efficace. On est là en présence de professionnels qui ont une véritable expérience dans le domaine de la prévention de la délinquance.
Qu’en est-il de la déradicalisation en milieu pénitentiaire ?
La mission s’est déplacée à la maison d’arrêt d’Osny où elle a pu visiter l’unité dédiée aux détenus identifiés comme radicalisés et condamnés pour des faits liés au terrorisme djihadiste. Là aussi, tout est fait de bric et de broc. Je n’y ai vu aucun détenu mais le directeur nous a décrit un programme de déradicalisation comportant des modules de géopolitique, d’enseignement d’anglais et des ateliers d’écriture. Bien sûr, les entretiens collectifs et individuels qui y étaient menés avaient du sens. Franchement, tout cela est-il sérieux ? Quelques semaines après notre déplacement, nous apprenions par la presse qu’un détenu radicalisé d’Osny avait agressé deux surveillants… […]
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